(Moscou) Confrontées à une situation « dramatique », Moscou et toute sa région ont rendu mercredi la vaccination contre la COVID-19 obligatoire dans le secteur des services, une première en Russie face à une campagne d’immunisation qui patine et en l’absence de tout confinement.

Cette décision est l’une des plus importantes au monde en termes d’ampleur de la population concernée.

« Nous sommes simplement obligés de tout faire pour effectuer des vaccinations de masse dans les plus brefs délais et arrêter cette terrible maladie », a annoncé, avec gravité, le maire de Moscou Sergueï Sobianine sur son site.  

Les autorités sanitaires de la ville ont « adopté aujourd’hui un décret sur la vaccination obligatoire des travailleurs du secteur des services », a-t-il poursuivi.

Peu après, la région de Moscou a décrété la même mesure.  

Sont ainsi sommés de se faire vacciner, entre autres, les personnels des transports, des magasins, de la restauration, des lieux culturels, des salons de beauté, de la santé et de l’éducation, des banques, etc.  

Les autorités n’ont pas précisé le nombre de personnes concernées parmi les 20 millions habitants de Moscou et sa région.  

Les autorités sanitaires moscovites ont justifié la mesure, relevant que plus de 70 % des contaminations des derniers dix jours concernaient la population active. M. Sobianine avait déjà décrété chômée la semaine du 15 juin.

Selon ce décret, 60 % des employés du secteur tertiaire doivent avoir reçu les deux doses du vaccin avant le 15 août.

A l’heure actuelle, 12 000 personnes sont hospitalisées à Moscou du fait du nouveau coronavirus et « la morbidité est au niveau des pics » de fin 2020, a noté le maire, en référence à la seconde vague meurtrière en Russie.

« La plupart de ces personnes ne tomberaient pas malades si elles avaient été vaccinées contre la COVID-19 à temps », a-t-il déclaré.

Rejet du vaccin

L’obligation de se faire vacciner va à l’encontre des déclarations faites jusqu’à présent par le président Vladimir Poutine.

« Il ne faut pas parler de vaccination obligatoire, ce n’est pas raisonnable », avait-il déclaré fin mai, tout en appelant de manière répétée les Russes à se faire inoculer l’un des sérums développés par la Russie, le Spoutnik-V en tête.  

Interrogé mercredi,  son porte-parole, Dmitri Peskov a déclaré qu’aucune obligation nationale n’était prévue. La veille, il avait cependant indiqué que la compétence revenait aux autorités régionales.

Irrité depuis des semaines par le rejet de la vaccination de ses administrés, le maire de Moscou a jugé que les non-vaccinés qui vont « dans des lieux publics et (entrent) en contact avec d’autres personnes » sont les « complices du processus épidémiologique ».  

Depuis près d’un an, l’appareil d’État et les médias publics mettent en avant la bonne gestion de la crise sanitaire et les prouesses du Spoutnik V, développé par la Russie et disponible depuis plus de six mois.  

Mais selon un sondage réalisé en avril par l’institut indépendant Levada, 60 % des Russes ne veulent pas du vaccin, malgré sa validation scientifique, échaudés par des décennies de propagande soviétique puis russe et des années de coupes budgétaires dans le domaine de la santé.

Seuls 1,8 million des 12 ou 13 millions d’habitants de Moscou sont vaccinés.  

Le pays a annoncé mercredi avoir dénombré 13 397 nouveaux cas au cours des dernières 24 heures et 396 morts. Moscou en a comptabilisé respectivement 5782 et 75.    

La Russie est parmi les États les plus touchés par la pandémie. Selon l’agence des statistiques Rosstat, plus de 270 000 morts lui étaient liés à fin avril soit plus du double du bilan de 127 576 décès reconnus à ce jour par le gouvernement dans sa comptabilité quotidienne.

Après le confinement strict du printemps 2020, la Russie, afin de préserver son économie, n’a mis en place que des restrictions anti-COVID-19 très limitées durant la seconde vague meurtrière de la fin d’année.  

Et l’essentiel de ces mesures a été levé dès début 2021, si bien que les Russes vivent une vie largement normale depuis six mois. Le port du masque y est aléatoire malgré l’obligation restée en vigueur.