(Londres) Le Parti conservateur du premier ministre britannique Boris Johnson est confronté à un problème d’islamophobie aux niveaux local ou individuel mais pas « institutionnel », a conclu mardi un rapport sur la discrimination au sein de la formation.  

« Le sentiment anti-musulman demeure un problème au sein du parti. C’est préjudiciable pour le parti et cela détourne une partie importante de la société », a souligné le rapport indépendant commandé à Swaran Singh en 2019.  

En tout, il a analysé 1418 plaintes pour discriminations adressées entre 2015 et 2020 aux conservateurs, relatives à 727 incidents, dont deux tiers concernaient des musulmans.  

Ce sentiment anti-musulman se retrouve aux niveaux local ou individuel, d’après le document, qui indique toutefois n’avoir pas identifié de « racisme institutionnel » dans le traitement des plaintes.  

« Au nom du Parti conservateur, je voudrais présenter mes excuses à tous ceux qui ont été blessés par un comportement discriminatoire ou qui ont été déçus par notre système », a réagi la co-présidente de la formation, Amanda Milling.

La députée a reconnu des « défaillances » dans le traitement des plaintes, mais a affirmé que le parti était « déterminé à réparer ces torts » et à « travailler davantage pour éradiquer toute forme de discrimination ».  

Les « Tories » adopteront la totalité des recommandations formulées dans le rapport et présenteront leur plan pour les mettre en œuvre « d’ici six semaines », a-t-elle promis.  

Ce rapport préconise notamment une refonte du système de gestion des plaintes, davantage de transparence dans la manière dont elles sont traitées, un code de conduite clair pour tous les membres, des formations et une révision des règles en matière de réseaux sociaux.  

« Paroles blessantes »

Accusé de laisser prospérer l’islamophobie dans ses rangs, le parti au pouvoir avait confié en décembre 2019 au professeur Swaran Singh, ancien membre d’une commission nationale sur l’égalité, cette étude très attendue sur la discrimination en son sein.

Cette annonce était intervenue peu après une très large victoire des conservateurs aux législatives, alors que l’opposition travailliste était aux prises avec des accusations d’antisémitisme chronique.  

Le premier ministre Boris Johnson est lui-même pointé du doigt pour avoir écrit en 2018, lorsqu’il était ministre des Affaires étrangères, un article dans lequel il comparait les musulmanes portant le voile intégral à des « boîtes aux lettres » ou des « voleurs de banque ».  

Cela accentue l’impression, selon le rapport, que « le parti et sa direction manquent d’égards envers les communautés musulmanes ».  

Boris Johnson s’est dit « désolé » si ses mots ont pu heurter. « Est-ce que j’utiliserais aujourd’hui certaines des paroles blessantes de mes écrits passés ? Non, pas maintenant que je suis premier ministre », a-t-il répondu dans le rapport.  

Son porte-parole a insisté mardi sur le fait que le dirigeant n’était pas raciste.  

L’ancien ministre de l’Intérieur Sajid Javid, fils d’immigrants pakistanais musulmans, a exhorté son parti à adopter « sans réserve et dans leur totalité » les recommandations du rapport.  

« Éradiquer la discrimination, envers les musulmans ou tout autre groupe minoritaire, est une question où les partis politiques de notre pays ont la responsabilité de faire preuve de leadership », a-t-il insisté.  

Pour Sayeeda Warsi, membre de la Chambre des Lords, le rapport est révélateur d’« un parti au mieux incapable de traiter du problème du racisme, au pire réticent à le faire ».