(Minsk) Des perquisitions ont visé mardi une vingtaine de journalistes, de militants associatifs et de responsables syndicaux en Biélorussie, dans le cadre d’une enquête sur le mouvement de contestation de 2020 réprimé par les autorités.

Ce pays a été le théâtre des mois durant de manifestations sans précédent contre la réélection en août du président Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994, sur fond d’accusations de fraudes électorales massives.

Violences policières

Le régime biélorusse a répliqué par d’importantes vagues d’interpellations, des violences policières et l’arrestation ou l’exil forcé des principales figures de l’opposition.

Mardi, la police a procédé à une nouvelle série de perquisitions qui ont visé 25 personnes, parmi lesquelles le président de l’Association biélorusse des journalistes, Andreï Bastounets, des responsables syndicaux et des militants associatifs, selon le centre Viasna de défense des droits humains, dont les locaux ont également été visités.

« Ils ont fouillé nos deux bureaux et ma maison. Ils ont emporté des documents et une partie du matériel, sans m’emmener au poste », a raconté à l’AFP le directeur de Viasna, Ales Beliatski, selon qui une quarantaine de perquisitions ont au total ainsi été effectuées.

Selon le Comité d’enquête biélorusse, chargé des principales investigations criminelles, ces raids interviennent dans le cadre d’une affaire sur le financement et l’organisation d’« actions portant gravement atteinte à l’ordre public ».

« Campagne d’intimidation des journalistes »

M. Bastounets, dont le bureau a également été perquisitionné, a annoncé sur Telegram avoir été brièvement interpellé, avant d’être relâché. Il a précisé avoir été mis en garde par les enquêteurs contre toute « divulgation du secret de l’enquête ».

« Ce qui se passe actuellement est une campagne massive d’intimidation des journalistes et des défenseurs des droits humains », a déclaré à l’AFP le vice-président du centre Viasna, Valentin Stefanovitch.

Pour sa part, la cheffe de l’opposition biélorusse, Svetlana Tikhanovskaïa, réfugiée en Lituanie, a dénoncé une « crise » du gouvernement qui « essaye de réprimer même ceux qui défendent les droits humains ».

Tous les Biélorusses sont en danger.

Svetlana Tikhanovskaïa, cheffe de l’opposition biélorusse

La commissaire du Conseil de l’Europe pour les droits humains, Dunja Mijatović, a dénoncé une situation « inacceptable ». « Les libertés d’expression, d’association et de réunion doivent être garanties conformément aux normes internationales », a-t-elle écrit sur Twitter.

477 journalistes été arrêtés en 2020 en Biélorussie

L’ONG Amnistie internationale a regretté dans un communiqué « une nouvelle répression brutale des organisations de la société civile et des médias indépendants ». Elle a fustigé la poursuite d’un « arbitraire gouvernemental choquant et sans précédent » depuis l’élection présidentielle d’août.

Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a affirmé la semaine dernière avoir infligé une défaite à un assaut étranger et d’opposants contre son régime, faisant allusion à la contestation.  

De nombreux médias et de nombreuses ONG ont également subi la répression.

Selon l’Association biélorusse des journalistes, 477 reporters ont été arrêtés l’année dernière en Biélorussie et plusieurs d’entre eux sont visés par des enquêtes criminelles.

Deux correspondantes de la chaîne de télévision Belsat, qui a son siège en Pologne, dont le procès a commencé la semaine dernière et doit reprendre mardi, risquent ainsi trois ans de prison pour avoir, selon les autorités, « porté gravement atteinte à l’ordre public ».