(Moscou) Une association russe LGBT a évoqué samedi un « danger de mort » après l’arrestation cette semaine de deux hommes et leur transport dans des conditions troubles vers la Tchétchénie, réputée pour sa persécution des homosexuels.

Salekh Magamadov et Ismaïl Issaev ont été appréhendés par les forces de l’ordre jeudi à Nijni Novgorod, dans l’ouest de la Russie, a indiqué l’ONG « LGBT Set ».

Après deux jours sans connaître leur localisation, l’association a confirmé samedi à l’AFP que les deux hommes se trouvaient désormais dans un commissariat de la ville de Goudermes, en Tchétchénie, à 1700 kilomètres plus au sud.

« Ils sont fatigués et effrayés. Pendant tout ce temps, on a fait pression sur eux pour qu’ils refusent de faire appel à un avocat », a indiqué l’ONG.

« Notre avocat sur place attend l’interrogatoire et essaye de comprendre les raisons de ces arrestations », a poursuivi cette source.

Selon « LGBT Set », ils ont dit avoir été interpellés par les services de sécurité (FSB), mais leur avocat n’a pu confirmer cette information.

Un porte-parole de l’ONG, Tim Bestsvet, a affirmé à l’AFP que les deux hommes, dont l’un est mineur, sont « en danger de mort ».

« Il y a eu des précédents quand des proches ramenaient en Tchétchénie des personnes que nous avions évacuées puis ces personnes mourraient ou étaient sans doute assassinées », a indiqué M. Bestsvet.

Il a précisé que les deux hommes avaient été évacués hors de Tchétchénie avec l’aide de son ONG en juillet 2020.

Au printemps de la même année, ils avaient été arrêtés par la police tchétchène et accusés d’être les modérateurs d’une chaîne d’opposition sur la messagerie Telegram.

Selon le journal russe Novaïa Gazeta, cette chaîne rassemblait des adolescents se présentant comme « athéistes » qui partageaient parfois des blagues sur les traditions islamiques tchétchènes, ainsi que des symboles chrétiens et LGBT.

« Ils ont été interpellés initialement pour leur orientation sexuelle », a soutenu M. Bestsvet, qui a ajouté qu’ils avaient été contraints, en avril dernier d’enregistrer des excuses filmées où ils disaient « ne pas être des hommes ».

À l’époque, ils avaient également été obligés, sous la torture, de reconnaître l’existence de Dieu, d’apprendre par cœur des passages du Coran, ainsi que l’hymne russe et tchétchène, a affirmé l’ONG.

Selon cette source, 25 autres participants de cette chaîne Telegram avaient aussi été interpellés et soumis au même traitement.

Sollicités par l’AFP, le FSB, le ministère de l’Intérieur tchétchène et le Comité d’enquête russe n’ont pas répondu pour l’heure.

La Tchétchénie, une république russe du Caucase, est régulièrement accusée de graves violations des droits envers les opposants politiques, les femmes et les personnes LGBT.

Son autoritaire dirigeant, Ramzan Kadyrov, y organise depuis plusieurs années une islamisation de la société.

Le journal Novaïa Gazeta, suivi par plusieurs ONG, avait révélé en 2017 que des homosexuels y étaient arrêtés et parfois torturés et assassinés par la police.