(Évry) Les avocats d’une dizaine de géants de l’agrochimie, dont Bayer-Monsanto, ont contesté lundi la compétence du tribunal d’Évry pour juger de la plainte d’une Franco-Vietnamienne victime de « l’agent orange », déversé sur les forêts par l’armée américaine pendant la guerre du Vietnam.

Née en 1942 en Indochine française, Tran To Nga affirme souffrir de pathologies causées par cet herbicide toxique déversé de 1961 à 1971 sur les forêts vietnamienne et laotienne pour empêcher la progression des troupes du Nord-Vietnam en guerre contre le Sud-Vietnam, soutenu par les États-Unis.

Quatre millions de personnes exposées

Soutenue par nombre d’associations, la septuagénaire a porté plainte en 2014 contre 14 firmes qui ont fabriqué ou commercialisé ce composé chimique, dont Monsanto (racheté en 2018 par l’allemand Bayer) et l’américain Dow Chemical.  

« L’agent orange » détruit la végétation, pollue les sols, intoxique végétaux et animaux. Les conséquences sanitaires sur la population (cancers, malformations) se font encore sentir aujourd’hui.

Quatre millions de personnes ont été exposées à « l’agent orange », estiment les ONG qui défendent les victimes.

À l’audience, les conseils des multinationales mises en cause ont plaidé lundi l’incompétence du tribunal d’Évry pour traiter de ce dossier.

Arguant que ces sociétés « agissaient sur l’ordre d’un État et pour son compte », le conseil de Monsanto, Me Jean-Daniel Bretzner, a fait valoir qu’elles pouvaient bénéficier de l’immunité de juridiction et qu’en conséquence, la juridiction française n’était pas compétente à juger de l’action d’un État étranger souverain dans le cadre « d’une politique de défense » en temps de guerre.

« C’est fondamentalement contraire au droit positif », a asséné l’avocat.

À travers ce procès présenté comme « historique », la plaignante et les ONG qui la soutiennent entendent promouvoir la reconnaissance internationale d’un « crime d’écocide ».