(Minsk) Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a ordonné vendredi aux hauts responsables des forces de l’ordre de sévir contre les manifestants contestant sa réélection jugée frauduleuse début août, appelant à « ne pas faire de prisonniers ».

« Nous ne ferons pas de prisonniers. Si quelqu’un touche à un membre des forces de l’ordre, et je l’ai déjà dit aux généraux, il doit s’en tirer au minimum sans sa main », a-t-il lancé.

« C’est tout. Nous n’avons nulle part où battre en retraite et nous ne battrons pas en retraite », a-t-il poursuivi.

« Le président n’a jamais fui et n’a pas l’intention de le faire », a-t-il averti.

Ces propos menaçants ont été prononcés lors d’une rencontre avec deux nouveaux hauts responsables des forces de l’ordre, après une série de nominations dénoncées par l’opposition comme « un affaiblissement du pouvoir ».

PHOTO NIKOLAI PETROV, BELTA,VIA REUTERS

L'ex-chef de police de Minsk Ivan Koubrakov a été nommé ministre de l’Intérieur, jeudi.

Depuis sa réélection contestée le 9 août, le chef de l’État, 66 ans dont 26 au pouvoir, fait face à un mouvement de protestation historique qui réunit chaque semaine des dizaines de milliers de manifestants, malgré la répression policière et les arrestations.

Après quasiment trois mois de contestation, Alexandre Loukachenko a limogé jeudi son ministre de l’Intérieur Iouri Karaïev, sanctionné par l’Union européenne pour son rôle dans les violences contre les manifestants.

Il a nommé à sa place Ivan Koubrakov, qui dirigeait auparavant la police de Minsk. Ce dernier a été remplacé à ce poste par Mikhaïl Grib.

Selon l’agence officielle Belta, Alexandre Loukachenko a rencontré vendredi les deux hommes en soulignant que de leur travail « efficace » dépendent, « comme jamais, la stabilité et le bien-être » du pays.

Iouri Karaïev et deux autres hauts responsables des services de sécurité ont été nommés conseillers du président dans la région de Grodno, celle de Brest et à Minsk, des endroits « particulièrement dangereux », selon M. Loukachenko, et marqués ces dernières semaines par une forte mobilisation contre le pouvoir.

La veille, Alexandre Loukachenko avait proposé la création de groupes d’anciens militaires et de policiers équipés d’armes pour assurer l’ordre.

Les autorités biélorusses ont par ailleurs fermé jeudi leurs frontières terrestres avec leurs voisins, excepté la Russie, évoquant des raisons sanitaires liées au coronavirus.

« Le régime se décompose de l’intérieur. La fermeture des frontières et ces nouvelles nominations sont un signe d’un affaiblissement de son pouvoir », a estimé Svetlana Tikhanovskaïa, la principale opposante biélorusse en exil.

« Il prend des décisions incohérentes car il panique », a-t-elle affirmé, dans un communiqué sur la messagerie Telegram.

Ces changements au sein de l’appareil sécuritaire interviennent alors que l’opposition a appelé lundi à une grève nationale pour faire plier le pouvoir.

Jusqu’à présent, le mouvement, face aux pressions, n’a pas débouché sur une paralysie de l’économie, en grande partie contrôlée par l’État, mais il a été suivi de multiples actions de protestations d’étudiants.

Selon le site d’informations indépendant Tut.by, plusieurs ouvriers et des étudiants ont été licenciés ou exclus de leur établissement.