(Paris) La cheffe de file de l’opposition biélorusse Svetlana Tikhanovskaïa a appelé mercredi la France à aider ses concitoyens victimes de la répression politique et à soutenir les médias indépendants dans son pays, secoué depuis août par une vague de contestation populaire contre le président Alexandre Loukachenko.

« Aidez le peuple biélorusse, aidez à éviter la violence et le conflit civil ! Aidez à sortir de cette crise de manière digne, aidez-nous à conduire des élections libres et équitables », a-t-elle lancé lors d’une audition en visioconférence devant la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale.

Si elle a réitéré son appel à « faire pression » sur le président Loukachenko, dont la réélection le 9 août est très contestée avec chaque dimanche des manifestations massives, pour obtenir de nouvelles élections, elle a aussi insisté sur une aide concrète aux manifestants victimes de la répression.

« Les sanctions c’est très important, mais ce n’est pas assez », a-t-elle souligné tout en demandant un « élargissement de la liste » de responsables biélorusses visés par des sanctions de l’Union européenne pour leur implication dans la répression de l’opposition.

« Nous avons besoin d’aide pour la société civile, pour les gens qui descendent dans les rues manifester au péril de leur vie », a insisté Mme Tikhanovskaïa, adversaire de M. Loukachenko à la présidentielle et désormais réfugiée en Lituanie.

« Nous avons beaucoup de personnes qui ont subi des violences et qui ont besoin d’aide médicale », a-t-elle dit en plaidant pour la mise en place d’un « couloir humanitaire » à cette fin vers les pays de l’UE.  

Elle a aussi demandé de l’aide pour « les journalistes indépendants », qui n’ont plus d’accréditation et couvrent à leurs risques et périls les manifestations. « Ce serait précieux d’avoir une aide de votre part en ce sens », a-t-elle insisté.

Les « fonds de solidarité » pour les prisonniers politiques, les manifestants qui ont perdu leur travail, ceux qui ont dû quitter leur pays, les étudiants expulsés des universités « peuvent nous aider », a-t-elle également pointé.

Citant l’exemple de pays de l’UE comme la Lituanie et la Pologne, elle a aussi invité la France à accueillir des étudiants biélorusses poursuivis dans leur pays afin qu’ils puissent continuer leurs études à l’étranger.

« Il faut être plus courageux dans vos propositions d’aide et il faut être unis, soutenir les initiatives d’autres pays de l’Union européenne », a souligné l’opposante.

« Dernière dictature d’Europe »

« Nous avons toujours admiré le courage du peuple français et sa culture politique. Aujourd’hui, le peuple biélorusse démontre aussi son courage », a-t-elle lancé, en remerciant la France et son président pour leur « aide inestimable ».

Le président Emmanuel Macron a promis, lors d’une rencontre avec Mme Tikhanovskaïa le 29 septembre à Vilnius, d’aider à la médiation de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) dans la crise politique biélorusse.

Mme Tikhanovskaïa a aussi invité les parlementaires français à se rendre à Minsk pour voir de leurs propres yeux les manifestations. « Ce n’est pas dangereux pour les étrangers » d’aller en Biélorussie et cela enverrait un « signal fort de soutien », a-t-elle assuré.

Côté République en Marche (majorité), la députée Anne Gentet a exprimé la « solidarité du peuple français » face à ce « mur de violences. » « Vous incarnez ceux qui peuvent faire tomber la dernière dictature d’Europe ! », a-t-elle lancé.

« Vous avez des paroles fortes, celles d’un peuple en mouvement. Lorsqu’un peuple bouge, il décide ! », a renchéri Didier Quentin pour Les Républicains (opposition).

Le député communiste Jean-Paul Lecoq, dressant un parallèle entre « la répression des manifestations en France, des Gilets jaunes » et celle « beaucoup plus violente » en Biélorussie, a répliqué : « Dans les deux cas, ce n’est pas acceptable ! ».  

Il faut « oser dire à ceux qui franchissent les lignes et qui asservissent les peuples que ça ne peut plus durer ! », a-t-il martelé.