(Bruxelles) Les dirigeants de l’UE ont donné vendredi leur feu vert pour sanctionner la Biélorussie, après s’être accordé sur un message de fermeté assorti de menaces de sanctions à la Turquie, à l’issue d’âpres négociations, selon des diplomates.

Les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne, réunis en sommet à Bruxelles, sont parvenus à un accord, après de longues heures de discussions pour convaincre Athènes et Nicosie, selon les mêmes sources à l’AFP.

Ces sanctions concernent une quarantaine de responsables biélorusses, accusés de répression contre l’opposition ou de falsification du résultat de l’élection présidentielle.  

« Si l’UE se rallie à nous […] cela pourrait aider beaucoup », avait déclaré jeudi à la radio RTL l’opposante biélorusse Svetlana Tikhanovskaïa.

Ces mesures étaient prêtes depuis plusieurs semaines mais devaient être approuvées à l’unanimité par les États membres : or, Chypre refusait de donner son aval si l’UE n’adressait pas d’abord un message musclé à la Turquie pour qu’elle cesse ses opérations illégales de forage dans ses eaux.

Le conflit en Méditerranée orientale, où la Turquie, la Grèce et Chypre se disputent des gisements d’hydrocarbures, s’est donc retrouvé au cœur des discussions au sommet jeudi.

De premières moutures d’un compromis sur un message de fermeté à l’encontre d’Ankara, assorti d’une menace de sanctions si elle ne cesse pas ses forages illégaux dans les eaux territoriales de Chypre, n’avaient pas été jugées assez dures par Nicosie et Athènes, selon des sources proches des discussions.

« Carotte et bâton »

Chypre réclamait que l’option des sanctions figure noir sur blanc dans les conclusions de la réunion sur les relations entre l’UE et la Turquie.

De son côté, la Grèce voulait que les Européens utilisent « la carotte et le bâton » : des offres d’ouverture à l’égard d’Ankara, notamment sur l’union douanière, mais assorties de menaces de représailles si la Turquie poursuivait ses actions déjà condamnées par l’UE, selon une source diplomatique grecque.

« L’heure est venue pour l’Europe de discuter avec courage et sincérité du genre de relations qu’elle veut vraiment avoir avec la Turquie », avait insisté avant le sommet le premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, pour qui les « provocations de la Turquie ne peuvent plus être tolérées ».

La voie était étroite pour les Vingt-Sept qui ne veulent pas compromettre le dialogue qu’Athènes et Ankara ont promis de reprendre à la suite d’une médiation allemande.

« La solidarité à l’égard de la Grèce et de Chypre […] est non négociable », avait averti le président français Emmanuel Macron à son arrivée à Bruxelles. « Quand un État membre de l’UE est attaqué, menacé, lorsque ses eaux territoriales ne sont pas respectées, il est du devoir des Européens de se montrer solidaires », a-t-il ajouté.

Plus nuancée, la chancelière allemande Angela Merkel avait fait valoir que « l’Union européenne a beaucoup d’intérêt à développer une relation réellement constructive avec la Turquie, malgré toutes les difficultés ».

Signe d’une volonté d’apaisement, un accord a été trouvé jeudi à l’OTAN entre Grèce et Turquie sur un mécanisme pour éviter les conflits. Mais le président Recep Tayyip Erdogan, qui s’est dit déterminé « à maintenir les voies du dialogue ouvertes », avait déploré jeudi que les Européens soient « pris en otages » par les Grecs et les Chypriotes.

Rejet des « ingérences »

Selon leur projet de conclusions, obtenu par l’AFP, les dirigeants devraient également condamner « les violences inacceptables » ainsi que « les intimidations, arrestations et détentions arbitraires » d’opposants par le régime d’Alexandre Loukachenko. Ils devraient aussi appeler à rejeter toute « ingérence extérieure », une mention visant implicitement Moscou.

Autre sujet de préoccupation pour les Européens, la situation au Nagorny Karabakh, théâtre de combats entre Arméniens et Azerbaïdjanais, malgré les appels au cessez-le-feu. Une internationalisation du conflit risque de déstabiliser une région où des puissances comme la Russie et la Turquie sont en concurrence.

Emmanuel Macron a affirmé disposer d’informations sur la présence de « combattants syriens de groupes djihadistes », « un fait très grave qui change la donne » dans ce territoire en majorité peuplé d’Arméniens, qui a fait sécession de l’Azerbaïdjan à la fin de l’URSS.