(Kiev) Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a défendu mercredi sa décision d’avoir cédé la veille à l’étrange condition d’un preneur d’otage en diffusant une vidéo dans laquelle il recommandait le visionnage d’un documentaire sur l’exploitation animale.

Dans un communiqué, M. Zelensky a décrit les négociations qu’il a menées avec cet homme armé qui a retenu mardi 13 personnes en otage dans un autobus à Loutsk, une ville de l’ouest de l’Ukraine.

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Ukrainian law enforcement officers lie on the ground behind a car near a passenger bus, which was seized by an unidentified person in the city of Lutsk, Ukraine July 21, 2020. REUTERS/Tetiana Hrishyna

« Nous avons un résultat : tout le monde est vivant », a dit le chef de l’État auquel certains dans son pays reprochent d’avoir donné suite à cette demande peu commune du forcené.

« Nous ne nous battons pas pour des cotes (de popularité), nous nous battons pour des vies », a-t-il assuré.  

Cette prise d’otage tendue s’est apaisée quand Volodymyr Zelensky a accepté de reproduire une courte vidéo sur sa page Facebook dans laquelle il incitait à regarder « Earthlings », un film documentaire de 2005 narré par l’acteur américain Joaquin Phoenix et condamnant les mauvais traitements infligés aux animaux.

M. Zelensky a expliqué s’être entendu avec le preneur d’otage, un homme de 44 ans identifié sous le nom de Maxime Krivoch, pour qu’il « libère trois personnes et qu’après j’enregistre cette vidéo ».

L’assaillant, qui avait auparavant fait feu et jeté une grenade en direction des forces de l’ordre, a effectivement libéré une femme âgée, un adolescent et une femme enceinte dans la foulée de sa conversation téléphonique avec le président ukrainien.

Il a ensuite relâché les autres otages et a été arrêté par la police. Après cette issue heureuse, M. Zelensky a rapidement supprimé la vidéo.

Selon les services de sécurité ukrainiens (SBU), aucun otage n’a été blessé dans cette prise d’otage de 12 heures, au cours de laquelle M. Krivoch avait menacé de faire exploser une bombe. Il risque jusqu’à 15 ans de prison pour « acte terroriste » et « prise d’otage », a précisé le SBU.

Le SBU a annoncé mercredi avoir arrêté plusieurs personnes soupçonnées d’être des complices du preneur d’otage, qui avait déjà fait près de 10 ans de prison, notamment pour « banditisme », « fraudes » et détention illégale d’armes.

« Nous vérifions des informations selon lesquelles (les suspects arrêtés) auraient participé à cet attentat », a déclaré le chef de l’antenne régionale du SBU à Loutsk, Pavlo Danioukov, pendant un breffage.

Tous les otages libérés se portent bien, a-t-il ajouté, « aucun d’entre eux n’a subi de violences ».

Des Ukrainiens ont cependant critiqué le président Zelensky pour avoir cédé au preneur d’otage, un homme qualifié d’« instable » par le ministre ukrainien de l’Intérieur, Arsen Avakov.

Certains ont comparé la situation à un épisode de la série télévisée populaire « Black Mirror », dans lequel un premier ministre britannique fictif remplit les conditions grotesques d’un homme détenant en otage un membre de la famille royale.

« C’est une erreur. On ne doit pas négocier avec les terroristes », a écrit sur Facebook un avocat travaillant à Kiev, Igor Pachnev.  

D’autres, en revanche, saluaient le président ukrainien, à l’image d’Edouard Rounine, un utilisateur de Facebook de la ville de Kharkiv, qui l’a remercié pour « avoir rempli les demandes du terroriste et gardé les gens vivants ».

L’ambassade des États-Unis en Ukraine a également fait l’éloge de la gestion de cet incident par les autorités ukrainiennes.

« Nous nous joignons au peuple ukrainien qui célèbre une libération sécurisée des otages […] et nous louons le succès des autorités ukrainiennes qui ont assuré cette libération », a commenté l’ambassade américaine sur Twitter.