(Ottawa) Le président ukrainien a déclaré mardi qu’il avait évoqué avec le premier ministre Justin Trudeau la nécessité de « punir » les Iraniens responsables de l’écrasement de l’avion ukrainien près de Téhéran la semaine dernière, qui a fait 176 morts.

Volodymyr Zelensky a rapporté sur Twitter sa plus récente conversation téléphonique avec M. Trudeau, quelques heures après que l’Iran a annoncé l’arrestation de certaines personnes qui auraient joué un rôle dans la tragédie. Le Canada, l’Ukraine et leurs alliés internationaux se préparent par ailleurs à une réunion jeudi à Londres pour pousser l’Iran à assumer ses responsabilités face aux familles des personnes à bord de l’avion abattu par un missile sol-air iranien.

« Nos experts et diplomates ukrainiens sont prêts à collaborer étroitement avec nos homologues canadiens à Téhéran, écrit le président Zelensky. Je l’ai confirmé une fois de plus à Justin Trudeau. Nous coordonnerons également les efforts pour punir les responsables de cette tragédie. »

Selon un compte rendu plus détaillé du gouvernement ukrainien sur cet appel téléphonique — le troisième en une semaine —, MM. Zelensky et Trudeau auraient également discuté d’une « poursuite de la coordination des efforts visant à garantir une responsabilité juridique internationale appropriée des responsables de l’écrasement d’avion ».

PHOTO EBRAHIM NOROOZI, ASSOCIATED PRESS

La scène où l’avion ukrainien s’est écrasé près de Téhéran la semaine dernière

Le cabinet du premier ministre Trudeau, dans son compte rendu de l’appel, a indiqué que les deux hommes avaient « souligné la nécessité d’une enquête complète et crédible, avec une participation internationale », afin de fournir « des réponses, une responsabilité et une justice que méritent tous ceux qui sont touchés par cette tragédie ».

Les victimes comprenaient 82 Iraniens, 57 Canadiens, 11 Ukrainiens et des ressortissants suédois, afghans et allemands. Le gouvernement canadien soutient que 138 des passagers se rendaient ultimement au Canada. La Presse canadienne a confirmé de façon indépendante les liens d’au moins 86 victimes avec le Canada ; plusieurs étudiants et professeurs rentraient au pays après avoir visité des proches en Iran pendant les vacances de fin d’année.

Des responsables arrêtés

On savait par ailleurs peu de choses, mardi, sur les chefs d’accusation portés contre les personnes arrêtées en Iran. L’annonce de ces arrestations par un porte-parole judiciaire iranien fait suite à une vague de mécontentement contre le régime, qui a nié pendant trois jours que son Corps des gardiens de la révolution islamique avait abattu l’avion ukrainien.

« Le pouvoir judiciaire devrait former un tribunal spécial, avec un juge de haut rang et des dizaines d’experts », a déclaré le président iranien, Hassan Rohani, dans un discours télévisé à la nation. « Ce n’est pas une cause ordinaire : le monde entier surveillera ce tribunal. »

AP

Le président iranien Hassan Rohani

Le président Rohani a qualifié la tragédie d’« erreur douloureuse et impardonnable » et il a promis que son administration poursuivrait cette affaire « par tous les moyens ».

Affaires mondiales Canada a annoncé mardi que le ministre des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, assistera jeudi à Londres à la « première réunion face à face » du Groupe international de coordination et d’intervention pour les familles des victimes du vol PS752, dans le but « de permettre aux familles et aux proches des victimes d’obtenir les réponses qu’ils méritent, d’assurer la responsabilité et la transparence, ainsi que d’obtenir justice, y compris une indemnisation ».

Des représentants de l’Ukraine, de la Suède, de l’Afghanistan et du Royaume-Uni seront présents jeudi à la Maison du Canada à Londres. « Ensemble, (nous) continuerons à attendre et à exiger la coopération et la responsabilité pleines et entières des autorités iraniennes, écrit M. Champagne dans un communiqué. Notre priorité demeure d’assurer le soutien aux familles et aux proches des victimes. »

Le « New York Times » a soutenu mardi que des images de caméra de surveillance montrent que deux missiles ont touché l’avion dans des tirs séparés d’environ 30 secondes.

La nouvelle vidéo semble apporter une explication au fait que le transpondeur de l’appareil a cessé de fonctionner quelques secondes avant d’être touché par un second missile.

Les enquêteurs canadiens

Les représentants de l’Équipe permanente de déploiement rapide (EPDR) et les enquêteurs du Bureau de la sécurité des transports du Canada ont commencé leur travail à Téhéran. Selon l’autorité de l’aviation civile iranienne, les enquêteurs canadiens ont effectué leur première visite sur le site de l’écrasement mardi après-midi.

L’avion a été abattu quelques heures seulement après des frappes aériennes de l’Iran contre deux bases militaires en Irak, où sont stationnés des soldats américains et canadiens. Ces attaques avaient été lancées en représailles à une frappe ciblée américaine qui visait à éliminer le haut général iranien Qassem Soleimani, le 3 janvier. Dans une entrevue accordée à Global News, le premier ministre Trudeau admettait lundi que s’il n’y avait pas eu cette escalade de tensions au Moyen-Orient, les Canadiens morts dans l’écrasement d’avion seraient aujourd’hui chez eux auprès de leur famille.

Le chef conservateur, Andrew Scheer, a publié mardi une série de messages sur Twitter appelant les libéraux à qualifier les Gardiens de la révolution d’« entité terroriste », à exiger de l’Iran l’indemnisation des victimes, à rapatrier les dépouilles et à imposer des sanctions si l’Iran ne coopérait pas pleinement à l’enquête internationale sur l’écrasement. « Le régime iranien ne peut pas s’en tirer si facilement après avoir tué 57 Canadiens », a soutenu M. Scheer.