(Paris) « Fêter Noël entre grévistes » : à l’approche du réveillon, les cheminots opposés à la réforme des retraites multiplient mardi les actions pour maintenir la mobilisation, qui a occasionné à la SNCF un manque à gagner de 400 millions d’euros.

Dans les transports, pas de miracle de Noël à attendre mercredi, 21e jour de grève : la SNCF annonce sans surprise une circulation « très perturbée », avec en moyenne un TGV sur 3, un Transilien sur 6 et trois TER sur 10. « Dans certaines grandes gares parisiennes » (Montparnasse, Est, Nord), aucun TGV ne partira ni n’arrivera « avant le début d’après-midi », tandis qu’en Île-de-France le trafic des lignes C, E, N et P « reprendra en début d’après-midi ».

Pour le week-end de chassé-croisé des vacances, du 27 au 29 décembre, la SNCF a annoncé qu’elle comptait faire rouler 6 TGV sur 10. Le voyage est confirmé et garanti « pour la plupart » des 800 000 voyageurs ayant une réservation sur ces dates, les autres étant « invités » à échanger leur billet.

« Au bout de vingt jours, on est à 400  millions d’euros de chiffre d’affaires qui n’aura pas été réalisé dans la période », déplorait le patron de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, dans un entretien au Monde mardi, prévenant que « les comptes 2019 seront fortement impactés par ce conflit ».

À la RATP, les portes de 14 lignes de métro sur 16 resteront closes mercredi. Seules les deux lignes automatiques 1 et 14 seront ouvertes et la ligne A du RER restera fermée toute la journée dans Paris tandis que la B fonctionnera partiellement.

Pour maintenir la flamme, la CGT-Cheminots a prévu des actions toute la semaine. « Il n’y a pas de raison que ça s’arrête soudain », affirme, dans l’Humanité, son secrétaire général Laurent Brun, se projetant déjà après Noël. « On ne s’arrête pas quand on a perdu 20 ou 25 jours de salaire juste parce que c’est le Nouvel An ».

Des syndicalistes de SUD, de la CGT et des militants de LFI dont Jean-Luc Mélenchon se sont retrouvés mardi gare de Lyon à Paris, pour déjeuner et « fraterniser ». « C’est le barbecue de Noël », a résumé Fabien Villedieu, qui accueillait ce repas dans le local syndical de SUD-Rail.

Même chose à Marseille, où cheminots, débardeurs, « gilets jaunes » et employés du privé se sont retrouvés pour un repas « festif, mais de lutte ». « […] ça donne de la force, mais ce n’est pas une pause, je suis encore gréviste aujourd’hui », assure Béatrix Marques, 42 ans, élue CGT et technicienne à l’assurance maladie.

À Saint-Denis, une cinquantaine de grévistes de la RATP s’étaient rassemblés dans la matinée devant le siège de la SNCF en soutien aux cheminots.  

Le nombre d’arrêts maladie a explosé au sein de la régie parisienne depuis le début de la grève, selon la direction, confirmant une information du Parisien qui évoque le stress des non-grévistes, mais aussi l’hypothèse selon laquelle ce serait un moyen de soutenir la grève sans perdre de salaire.

Manifester en tutu

Pour aider les grévistes, le syndicat Info’Com-CGT a remis mardi un chèque de 250 000 euros issus de sa caisse de grève aux salariés de la RATP.

Le mouvement de grève touche aussi les raffineries, mais l’approvisionnement des stations-service est « quasi normal », même si la situation est localement plus tendue en région PACA, a assuré mardi l’Union française des industries pétrolières (UFIP).

Autre institution touchée par la grève, l’Opéra de Paris, dont une quarantaine de danseuses ont donné un mini-spectacle devant le palais Garnier, en tutu blanc pour manifester contre la réforme qui menace leur régime spécial.

Mais l’exécutif, qui veut remplacer les 42 régimes de retraite existants par un « système universel » par points, exclut de revenir sur la « suppression des régimes spéciaux », a rappelé son nouveau « Monsieur Retraites », Laurent Pietraszewski.

Matignon a communiqué lundi soir son programme de concertations avec les partenaires sociaux : ils seront reçus le 7 janvier par plusieurs ministres pour parler pénibilité et gestion des fins de carrière. Les discussions se poursuivront avant la présentation du projet de loi en Conseil des ministres le 22 janvier.

Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, a regretté mardi d’avoir appris par la presse ce calendrier et ne sait pas encore s’il s’y rendra.

Parallèlement, le premier ministre Édouard Philippe « proposera […] une méthode de travail » concernant l’équilibre financier du système de retraites durant la « semaine du 6 janvier ».

« Les sujets sur lesquels on nous propose de discuter n’ont rien à voir avec le système universel des retraites », avait dénoncé dès lundi le numéro un de Force ouvrière, Yves Veyrier, appelant à nouveau le gouvernement à renoncer purement et simplement à la réforme. Avec la CGT, FO sera à nouveau dans la rue le 9 janvier.