(Paris) Le président français Emmanuel Macron a appelé mardi « la Nation tout entière » à « faire bloc » pour combattre « l’hydre islamiste », lors d’un hommage aux quatre fonctionnaires tués jeudi par un de leurs collègues au sein même de la préfecture de police de Paris (PP).  

Les enquêteurs ont entrepris d’analyser une clé USB retrouvée dans le bureau de Mickaël Harpon, l’auteur de l’attaque qui travaillait à la PP depuis 2003, dont le contenu suscite des spéculations et des inquiétudes en interne.

« La clé USB contient des données informatiques en très grand nombre », fait valoir une source proche de l’enquête. « Dès aujourd’hui, des gens sont réquisitionnés dans tous les services […] pour travailler sur les données de la clé », ajoute-t-elle.  

Les enquêteurs s’emploient à faire un « inventaire exhaustif » du contenu de cette clé, afin notamment de déterminer si des images de propagande du groupe État islamique qui s’y trouvent ainsi que des données relatives aux employés de la PP étaient liées ou non à son activité professionnelle.

« C’était un informaticien de l’anti-terro à la DRPP (direction du renseignement de la PP, NDLR), quand il faisait de la maintenance, il pouvait faire des copies du contenu des ordinateurs », veut relativiser une source proche du dossier.

Dans la matinée, face aux quatre cercueils alignés devant le monument aux morts dans la cour de la préfecture, Emmanuel Macron a assuré qu’un « combat sans relâche » serait mené « face au terrorisme islamiste ».  

« Vos collègues sont tombés sous les coups d’un islam dévoyé et porteur de mort qu’il nous revient d’éradiquer », a lancé le chef de l’État. « La lumière sera faite, les interrogations levées, les responsabilités établies, la justice passera », a-t-il promis.

« Les institutions seules ne suffiront pas » à « venir à bout de l’hydre islamiste », a-t-il lancé. « C’est la Nation tout entière qui doit s’unir, se mobiliser pour agir », a-t-il dit, appelant à bâtir une « société de vigilance ».

Commission d’enquête

Cet attentat sans précédent, mené au cœur d’une administration censée être l’un des fers de lance de la sécurité de l’État, vaut au ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, une volée de critiques et plusieurs convocations au parlement.

Le premier ministre Édouard Philippe est une nouvelle fois venu à son soutien mardi, affirmant devant les députés « assumer, au nom du gouvernement, tout ce qui a été fait dans l’État » en matière de lutte antiterroriste.

Certains dans l’opposition, à droite et à l’extrême droite, ont exigé la démission du ministre de l’Intérieur, exclue par l’intéressé qui a toutefois reconnu un « dysfonctionnement d’État ».

Le ministre a été auditionné à huis clos mardi matin par la délégation parlementaire au renseignement sur d’éventuels « dysfonctionnements » ayant permis l’attaque.

Il a enchaîné dans l’après-midi avec la commission des lois de l’Assemblée nationale, cette fois devant la presse. Il sera également interrogé jeudi par la commission des lois du Sénat.

Le président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand a annoncé mardi qu’il allait accepter la demande de l’opposition de droite de créer une commission d’enquête sur l’attaque, et que celle-ci se mettrait au travail « dès la semaine prochaine ».

Selon un rapport interne de la DRPP, Mickaël Harpon, qui était habilité «Secret Défense», aurait déclaré à deux collègues « c’est bien fait » au sujet de l’attentat en janvier 2015 contre le magazine satirique Charlie Hebdo, mais ces derniers n’ont pas transmis de signalement écrit à leur hiérarchie.

« Les signaux d’alerte auraient dû être suffisants pour déclencher une enquête en profondeur », a accusé M. Castaner.

L’assaillant était converti à l’islam depuis une dizaine d’années et fréquentait des membres de la mouvance « islamiste salafiste », selon les enquêteurs qui s’interrogent également sur ses éventuels problèmes psychologiques vu son « comportement inhabituel et agité » à la veille de l’attaque.


Deux enquêtes administratives confiées à l’Inspection générale du renseignement ont été ouvertes.

Sans attendre les conclusions, Christopher Castaner a tenté d’éteindre la polémique en demandant que toute alerte liée à la radicalisation fasse désormais « l’objet d’un signalement automatique », sans plus de précisions.