(Londres) Un régulateur britannique a infligé une amende à la chaîne russe RT pour son manque d’«impartialité» dans le traitement de l’empoisonnement d’un ex-agent double russe au Royaume-Uni, Moscou menaçant en retour les médias britanniques de «conséquences».

Dans un communiqué diffusé vendredi, le régulateur Ofcom a expliqué que RT, financée par l’État russe, devrait non seulement s’acquitter d’une amende de 200 000 livres (327 000 $ CAN), mais aussi annoncer sur son antenne les résultats de l’enquête de ce régulateur des médias.

«Notre enquête a déterminé que RT n’avait pas respecté l’impartialité nécessaire dans sept programmes d’actualité diffusés entre le 17 mars et le 26 avril 2018», a souligné l’Ofcom, qui a ajouté avoir été «particulièrement préoccupé par la fréquence des infractions aux règles par RT en un court laps de temps».  

Les programmes traitaient notamment de la réponse des autorités britanniques à l’empoisonnement de l’ex-agent double Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia à l’agent neurotoxique Novitchok, le 4 mars à Salisbury, dans le sud de l’Angleterre.  

REUTERS

Une équipe de décontamination à l'oeuvre dans un parc de Salisbury, en mars 2018, où ont été retrouvés empoisonnés l'ex-agent double russe Sergueï Skripal et sa fille.

L’empoisonnement des Skripal, qui ont survécu à l’attaque, a été attribué à la Russie par les autorités britanniques. Deux hommes, identifiés comme des agents du GRU, auraient commis les faits avant de fuir vers la Russie. L’épisode a provoqué une crise diplomatique entre le Royaume-Uni et la Russie qui clame son innocence.  

Les autres programmes de RT (ex-Russia Today) visés par l’Ofcom concernaient le conflit en Syrie, a précisé le régulateur.

La Russie a immédiatement réagi : «Nous considérons la décision (du régulateur) Ofcom comme un acte direct de censure», a fustigé le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.  

«Nous suivons attentivement l’évolution de la situation et rappelons aux médias britanniques travaillant en Russie qu’ils doivent être prêts à faire face aux conséquences des actes de Londres», a-t-il ajouté.

La Russie accuse également les médias britanniques de régulièrement déformer les faits dans leurs publications concernant la Russie. «Pour une certaine raison, la désinformation systématique des médias britanniques n’attire pas l’attention du régulateur», estime le ministère.

L’Ofcom avait reproché dès le mois de décembre dernier à RT de n’avoir pas respecté «l’impartialité nécessaire», mais n’avait alors pas prononcé de sanction. D’après le régulateur, l’un des programmes de RT avait notamment «exagérément mis en doute la position du gouvernement britannique jugeant que le gouvernement russe était responsable de l’incident» de Salisbury.  

Suite à ce premier avis, RT avait intenté une action en justice, reprochant au régulateur d’avoir statué sur le sujet de façon «contraire à la loi et inexacte».  

Un porte-parole de RT a estimé vendredi qu’il était «injuste que l’Ofcom ait publié une sanction contre RT sur la base de conclusions qui font l’objet d’une procédure judiciaire à la Haute Cour de Londres».  

Au-delà, ce porte-parole a jugé «l’ampleur de l’amende particulièrement inappropriée et disproportionnée». RT a souligné que des chaînes de télévision distinctes ayant diffusé au Royaume-Uni des programmes «de haine et incitant à la violence» avaient été condamnées «à des amendes nettement plus faibles».