(Genève) Un expert des droits humains de l’ONU, critiqué à cause d’un article controversé sur les accusations de viol visant Julian Assange, continue de penser que la police suédoise avait cherché à «réduire au silence» le fondateur de WikiLeaks.

Le Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Nils Melzer, est l’un des plus ardents défenseurs de M. Assange depuis son arrestation en avril à Londres.

La semaine dernière, il a posté un blogue sur la plateforme Medium qui met en doute les accusations de viol et d’agression sexuelle portées contre l’Australien par deux Suédoises, et accuse la police suédoise de grave faute.  

Le blogue a suscité une vive réaction.  

Mardi, 272 avocats, activistes et autres défenseurs des droits humains ont signé une lettre qualifiant l’article d’«indigne venant d’un représentant de l’ONU».

AFP

Julian Assange

En août 2010, une Suédoise avait accusé M. Assange d’avoir sciemment déchiré son préservatif pendant un rapport sexuel, contre sa volonté, mais les faits avaient été prescrits en 2015.

Quelques jours plus tard, une deuxième plaignante l’avait accusé d’avoir engagé un rapport sexuel pendant qu’elle dormait et sans préservatif, alors qu’elle lui avait refusé tout rapport non protégé. Ces faits seront prescrits en août 2020.

Dans son blogue, M. Melzer écrit que les deux incidents «ne sont pas exactement des scénarios qui ressembleraient à un “viol” dans toute autre langue que le suédois», que l’expert maîtrise parfaitement.  

Dans leur lettre, les activistes l’accusent d’avoir fait preuve «non seulement d’une insensibilité à l’égard des victimes d’agression sexuelle, mais aussi d’un manque total de compréhension qui porte tort au mandat qu’il représente».  

La lettre exige une réponse des responsables de l’ONU, à commencer par la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Michelle Bachelet.

Le Bureau de Mme Bachelet n’a pas répondu à une demande de réaction.  

M. Melzer dit regretter que son article ait provoqué des «incompréhensions», mais qu'il «maintien[t] son contenu.»

Il a affirmé avoir vu des preuves importantes, y compris des rapports de police, démontrant que les autorités suédoises ont gonflé les accusations contre M. Assange pour des raisons politiques.

«Toutes les indications que je vois ici […] pointent du doigt un abus délibéré du système judiciaire pour réduire au silence Assange», a-t-il dit.

M. Melzer affirme notamment que la deuxième victime présumée s’était présentée à la police seulement pour forcer Julian Assange à faire un test contre le VIH et que la police avait initié une plainte pour viol «contrairement aux dires et au souhait» de la femme.

M. Assange s’était réfugié en 2012 à l’ambassade d’Équateur à Londres, pour éviter une extradition réclamée par Stockholm et aussi pour fuir la justice américaine après la publication par WikiLeaks de documents confidentiels sur les forces américaines.  

Mais il a été interpellé le 11 avril à l’ambassade d’Équateur après une nouvelle demande d’extradition formulée par les États-Unis. La Suède en a profité pour relancer ses poursuites pour viol présumé.