(Sotchi) Les chefs de la diplomatie russe et américaine Sergueï Lavrov et Mike Pompeo se sont livrés mardi à une passe d’armes sur les accusations d’ingérence de Moscou dans les élections aux États-Unis, en dépit de la volonté qu’ils ont affichée de renouer le dialogue.

La visite du secrétaire d’État américain à Sotchi, sur la mer Noire, où il devait rencontrer dans la soirée Vladimir Poutine, constitue la rencontre au plus haut niveau entre responsables des deux puissances rivales depuis le sommet d’Helsinki de juillet.

Après trois heures d’entretiens, les deux responsables ont multiplié face à la presse les appels à aller de l’avant, mais le sujet de l’interférence dont Washington accuse Moscou est revenu sur la table.

Si la Russie s’ingérait dans la présidentielle américaine de 2020, «cela aggraverait encore notre relation», a averti M. Pompeo, demandant à Moscou de «démontrer que ce type d’activités appartient au passé».

Sergueï Lavrov a qualifié de «pure fiction» les accusations de collusion entre Donald Trump et la Russie et a de nouveau démenti toute ingérence : «Les faits montrent que ceux qui montent ce sujet en épingle n’ont pas de preuves».

Il a dit «espérer» malgré tout que la récente publication du rapport Mueller permettrait «d’avancer pour mettre en place un dialogue professionnel».

Lors du sommet d’Helsinki, le ton conciliant du président Trump à l’égard du maître du Kremlin avait alors choqué la classe politique américaine.  

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Donald Trump et Vladimir Poutine à Helsinki le 16 juillet 2018.

La Maison-Blanche espère toutefois que la fin de l’enquête de Robert Mueller, qui a conclu il y a moins de deux mois à une ingérence russe dans la présidentielle de 2016 aux États-Unis mais pas à une collusion entre l’équipe du candidat Trump et la Russie, permette de tourner la page de relations glaciales.  

«Je suis ici aujourd’hui parce que le président Trump est déterminé à améliorer cette relation», a assuré M. Pompeo dès son arrivée.

Rencontre en juin?

Lundi, Donald Trump avait annoncé qu’il rencontrerait les présidents russe Vladimir Poutine et chinois Xi Jinping lors du sommet du G20 qui se tiendra fin juin au Japon.

Si le Kremlin a aussitôt affirmé qu’«aucun accord» n’était convenu, M. Lavrov a ensuite assuré que la Russie réagirait «positivement» à une proposition d’entretien.

Le chef de la diplomatie russe a qualifié ses pourparlers avec Mike Pompeo de «francs et utiles» : «Nous nous sommes mis d’accord sur l’importance de rétablir les canaux de communication. Ces derniers temps, ils étaient gelés».

Les points de discorde restent nombreux et les deux responsables se sont également opposés sur le Venezuela, M. Pompeo demandant à la Russie de cesser de soutenir le président Nicolas Maduro.

«La démocratie ne s’établit pas par la force», a répliqué M. Lavrov, disant ne «pas vouloir s’attarder sur l’état de la démocratie en Irak et en Libye».

Le sujet du désarmement est revenu au premier plan avec la récente suspension par les États-Unis, imités par la Russie, de leur participation à un traité datant de la Guerre froide interdisant les missiles sol-sol d’une portée de 500 à 5500 km.

Moscou et Washington doivent désormais négocier le prochain traité de contrôle des armements nucléaires Start, l’actuel arrivant à échéance en 2021 et le gouvernement Trump souhaitant y inclure la Chine, comme l’a répété Mike Pompeo mardi.

Le secrétaire d’État américain a indiqué que Moscou et Washington auraient «des discussions plus détaillées dans les semaines à venir».

M. Lavrov a dit espérer un accord mais a ajouté que «prédire l’avenir n’est pas le travail des diplomates». Il s’est dit «préoccupé» par de possibles violations américaines.