Les 29 pays membres de l'OTAN tentent jeudi à Washington d'afficher leur unité face aux «agressions» de la Russie, lors d'un anniversaire terni par des différends entre les États-Unis et plusieurs de ses alliés-clés.

Retour aux fondamentaux, 70 ans après la signature par 12 pays fondateurs, le 4 avril 1949 dans la capitale américaine, du traité de l'Alliance atlantique née pour contrer l'Union soviétique au début de la Guerre froide.

Le monde a changé mais Moscou reste la principale «menace» aux yeux de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, célébrée comme l'alliance la plus ancienne et «la plus efficace de l'Histoire».

«Nous ne voulons pas d'une nouvelle Guerre froide», mais «la Russie a fait du monde un endroit moins sûr», a martelé son secrétaire général, Jens Stoltenberg, dans la capitale américaine. L'OTAN doit s'adapter à une Russie devenue «plus agressive», ont acquiescé les ministres des Affaires étrangères alliés dans un communiqué.

Jeudi, à l'ouverture de leur réunion, Jens Stoltenberg a de nouveau accusé la Russie de «violer» le traité de désarmement sur les armes nucléaires de portée intermédiaire (INF) «en déployant des missiles susceptible d'être armés d'ogives nucléaires en Europe».

Les États-Unis ont dénoncé début février ce texte signé avec Moscou pendant la Guerre froide. La Russie les a imités en suspendant à son tour sa participation, et les négociations sont dans l'impasse.

«L'OTAN est aussi unie désormais pour se préparer à vivre dans un monde sans traité INF» en préservant «une dissuasion et une défense crédibles et efficaces», a prévenu son chef.

Les Alliés ont aussi abordé «les actes d'agression de la Russie dans la région de la mer Noire», a-t-il ajouté, tandis que le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo, hôte de la réunion, a placé «l'agression russe» en tête des «menaces» face auxquelles il faut «adapter» l'Alliance.

Sécurité en mer Noire

Les ministres ont adopté des mesures pour «renforcer la surveillance» aérienne et maritime en mer Noire. Dès jeudi, un navire allié patrouillait sur place lors d'exercices conjoints avec les flottes ukrainienne et géorgienne.

Objectif : «Faire en sorte que les bateaux ukrainiens puissent passer en toute sécurité par le détroit de Kertch et la mer d'Azov», a expliqué mardi l'ambassadrice des États-Unis auprès de l'OTAN, Kay Bailey Hutchison.

Il s'agit d'une réponse à l'affrontement armé entre les marines russe et ukrainienne en novembre au large de la péninsule de Crimée, dont l'annexion il y a cinq ans par la Russie n'a jamais été reconnue par les Occidentaux.

«Il est temps d'arrêter de ressortir la "menace de l'Est"», a réagi la diplomatie russe dans un communiqué, accusant l'OTAN de continuer à «renforcer sa confrontation militaire et politique avec la Russie».

Cette confrontation offre de fait aux Alliés une occasion de refaire leur unité, mise à mal par plusieurs bisbilles entre les États-Unis de Donald Trump et plusieurs de leurs alliés.

Mercredi, le vice-président américain Mike Pence a ravivé les tensions avec l'Allemagne, accusée de ne pas mettre suffisamment la main au portefeuille pour contribuer aux dépenses militaires.

Au nom d'un meilleur «partage du fardeau», principal cheval de bataille de Donald Trump qui n'a eu de cesse de bousculer l'OTAN depuis deux ans, les ministres se sont engagés jeudi à «faire plus» en matière d'investissements de défense.

L'administration américaine a aussi haussé le ton contre la Turquie, qui a entrepris d'acheter à la fois un système de défense antimissiles russe, les S-400, et des avions de chasse américains, les F-35. Malgré la menace de sanctions économiques américaines, le gouvernement turc s'est dit déterminé à persister dans l'achat de ces armements russes.

Selon le département d'État américain, Mike Pompeo a aussi mis en garde mercredi son homologue turc Mevlut Cavusoglu contre «les conséquences potentiellement dévastatrices» d'une intervention militaire d'Ankara pour déloger du nord-est de la Syrie les combattants kurdes alliés des États-Unis dans la lutte antidjihadistes.

Signe que leur rencontre à Washington n'a pas apaisé les esprits, la diplomatie turque s'est offusquée d'un compte-rendu américain qui «ne reflète par le contenu de l'entretien».

«Seule l'unité interne peut permettre de présenter un front uni et fort sur la scène internationale», a prévenu le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas. Et face aux nouveaux défis, de la Chine aux cyberattaques en passant par la menace terroriste, «nous en avons urgemment besoin».

REUTERS

Des S-400 russes.