Le nombre de migrants arrivant en Europe de façon irrégulière a atteint son niveau le plus bas depuis cinq ans, selon un rapport publié hier par la Commission européenne.

En 2018, les pays de l'UE ont enregistré 150 000 arrivées irrégulières, soit 25 % de moins qu'en 2017, et plus de 90 % sous le niveau atteint lors de la vague migratoire de 2015, affirme le rapport.

Ce qui fait dire au vice-président de la Commission, Frans Timmermans, que « l'Europe est sortie de la crise migratoire que nous avons connue en 2015 ». Des problèmes structurels demeurent, certaines routes sont plus fréquentées qu'avant, mais globalement, les « actions communes » menées depuis cette période ont permis de freiner substantiellement le flot de migrants.

La publication de ce rapport survient 11 semaines avant le premier tour des élections européennes qui pourraient être marquées par une montée des partis d'extrême droite, farouchement opposés à l'immigration.

La Commission européenne profite d'ailleurs de l'occasion pour diffuser une brochure destinée à détricoter une série de « mythes » sur les migrations. 

On y lit entre autres que « l'Europe n'est plus en mode de crise migratoire », que « l'Union européenne n'est ni une porte ouverte ni une forteresse » et qu'il n'existe « aucun plan secret pour encourager des migrations indésirables ».

Le quotidien The Guardian estime que le ton inhabituellement musclé utilisé dans cette brochure constitue une réponse directe à la campagne lancée par le premier ministre de la Hongrie Viktor Orbán visant à placer la question migratoire au coeur du vote européen du 23 mai.

Migrants détenus en Libye

La campagne d'information de la Commission européenne envoie « un message important dans le contexte des élections européennes », convient le représentant du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés à Ottawa, Jean-Nicolas Beuze.

Un message qui cible surtout la droite, mais qui envoie aussi quelques flèches aux défenseurs des migrants qui critiquent l'UE pour sa politique hostile aux migrants. Notamment en ce qui a trait au traitement de ceux qui sont détenus dans des conditions atroces en Libye.

L'UE « travaille inlassablement pour évacuer les migrants détenus en Libye », assure la brochure de la Commission européenne. Ou encore : « Dans ses opérations, l'Union européenne ne renvoie personne en Libye. »

Au cours des dernières années, l'UE a en fait formé des gardes-côtes libyens afin qu'ils arrêtent les bateaux de migrants et les empêchent de poursuivre leur route vers l'Europe. 

Parallèlement, les entraves se multiplient contre les ONG qui viennent au secours des migrants dans les eaux internationales - et qui éprouvent de plus en plus de difficultés à trouver un port de débarquement.

Prix humain

Cette politique a vraisemblablement contribué à réduire le nombre d'arrivées en augmentant le niveau de risque associé à ces traversées, reconnaît Jean-Nicolas Beuze.

Mais ce résultat a un prix humain. « Le HCR est préoccupé par les détentions prolongées dont sont victimes de nombreux réfugiés en Libye », s'inquiète l'agence de l'ONU dans un communiqué récent. Le HCR estime qu'environ 5700 migrants sont actuellement incarcérés dans des centres de détention libyens.

« C'est vrai que le nombre de demandeurs d'asile en Europe n'a pas été aussi bas depuis longtemps, mais pendant ce temps, toutes les six heures, un migrant se noie dans la Méditerranée », souligne Jean-Nicolas Beuze.