Deux semaines après la profanation d'un cimetière juif près de Strasbourg, la stèle marquant l'emplacement d'une ancienne synagogue dans cette ville de l'est de la France, dynamitée par les nazis en 1941, a été vandalisée dans la nuit de vendredi à samedi, suscitant une cascade de condamnations.

C'est un passant qui a signalé samedi matin à la police « des dégradations sur la stèle commémorative », installée à l'endroit où se trouvait l'ancienne synagogue de Strasbourg et renversée dans la nuit, a indiqué la préfecture.

Le monument, qui pèse 1,6 tonne, a été remis en place vers 14 h 30 GMT (9 h 30, HE) par les services de la ville, a constaté l'AFP.

L'enquête ouverte va « explorer toutes les pistes - vidéosurveillance et témoignages - afin de déterminer l'origine intentionnelle ou accidentelle de l'événement », selon une source proche du dossier, ainsi que son caractère antisémite.

Cet « acte de vandalisme » a « tous les signes de l'antisémitisme », a estimé devant la presse Alain Fontanel, premier adjoint au maire de Strasbourg.  

« Colère et révolte »

L'élu a évoqué des images de vidéosurveillance montrant samedi « un peu avant 7 h » la présence près de la stèle d'une voiture. « Il faut maintenant voir » si son ou ses occupants ont « commis l'acte », a-t-il dit.

Souvenir de l'ancienne synagogue, la stèle a été installée en 1976 et porte l'inscription : « ici s'élevait depuis 1898 la synagogue de Strasbourg, incendiée et rasée par les nazis le 12 septembre 1940 », lorsque l'Alsace venait d'être annexée par le IIIe Reich. Les décombres de la synagogue avaient été dynamités l'année suivante, en 1941.

Ce nouvel acte, qui s'inscrit dans un contexte général de hausse des actes antisémites, a suscité une indignation unanime.

La dégradation a suscité « tristesse, dégoût, colère et révolte » au sein de la Grande Mosquée de Strasbourg, a indiqué dans un communiqué son président Saïd Aalla, condamnant « avec la plus grande fermeté ce nouvel acte antisémite ».

Le ministère israélien des Affaires étrangères a dénoncé sur Twitter des « images choquantes », soulignant que « la haine antisémite et le vandalisme sont à la hausse en France et dans toute l'Europe ».

« Le moment est venu d'agir », a-t-il exhorté.

« Je condamne la dégradation de la stèle », a réagi sur Twitter le président du Parlement européen, Antonio Tajani, appelant à « stopper la recrudescence de l'antisémitisme ».

« Un mémorial juif vandalisé : une tendance triste et dangereuse », a tweeté Daniel Holtgen, porte-parole du Conseil de l'Europe, vigie des droits de l'homme en Europe.

« Une nouvelle fois : ça suffit ! » a lancé le maire socialiste de Strasbourg, Roland Ries.

Le consistoire israélite du bas-Rhin « est consterné par la dégradation de cette stèle [...], que ce soit intentionnel ou non », a indiqué son porte-parole  Thierry Roos en notant, prudemment, qu'une enquête était en cours.

« Si vous détruisez un tel monument et que vous fuyez, vous êtes coupable [...] de vouloir, intentionnellement ou non, éliminer une certaine mémoire dans un contexte très tendu d'antisémitisme », a-t-il toutefois observé.

« Émotion »

Le président du parti Les Républicains (droite) de la région Grand Est, Jean Rottner a exprimé « son indignation et son émotion devant ce nouvel acte antisémite ».

Le département a été frappé à plusieurs reprises par l'antisémitisme ces derniers mois. L'épisode le plus récent remonte au 19 février, lorsque 96 tombes du cimetière juif de Quatzenheim, au nord-ouest de Strasbourg, ont été retrouvées recouvertes de croix gammées. Un rassemblement contre l'antisémitisme est prévu dimanche devant le cimetière.

Le 11 décembre, jour de l'attentat djihadiste contre le marché de Noël de Strasbourg, un autre cimetière juif avait été découvert profané à Herrlisheim, au nord-est de Strasbourg : trente-sept stèles et le monument des martyrs de la Shoah avaient été souillés de graffitis antisémites.

Et en 2015, environ 300 tombes du cimetière juif de Sarre-Union avaient été vandalisées. L'enquête avait mis en évidence un mobile antisémite et cinq adolescents, qui avaient reconnu leur participation, avaient été condamnés en 2017 à des peines allant de huit à 18 mois de prison avec sursis.