Avant les plaidoiries, la cour d'assises de Paris a entendu lundi les ultimes témoins dans le procès des deux policiers accusés par une Canadienne de l'avoir violée : certains sont favorables à la plaignante tandis qu'un ex-ami a mis en cause ses déclarations.

La question de la crédibilité de la plaignante a une nouvelle fois été au centre des débats, au 11e jour du procès. Le coup dur est venu de l'homme avec lequel Emily Spanton est arrivée à Paris en vacances, en avril 2014.  

Ils s'étaient rencontrés sur l'internet, quelques mois avant le voyage. Max R., un avocat âgé de 71 ans, a payé le billet d'avion d'Emily Spanton ; ils partageaient une chambre d'hôtel, sans toutefois être en couple.

Ils n'ont plus de lien depuis qu'ils ont quitté Paris, où Emily Spanton, aujourd'hui âgée de 39 ans, affirme avoir été violée par des policiers de la BRI (Brigade de recherche et d'intervention), dans la nuit du 22 au 23 avril 2014.  

« Je considère que ce n'est pas une personne de confiance. Je pense qu'elle racontait des histoires qui n'étaient pas forcément vraies », déclare Max R., depuis Toronto, par vidéoconférence.

L'avocat général Philippe Courroye lui oppose qu'en 2014, il avait déclaré qu'elle n'était « pas affabulatrice ». Il botte en touche.

L'homme, affalé dans un fauteuil, l'air nonchalant, poursuit : « Elle m'a dit que dans son passé, elle avait eu des relations sexuelles avec plusieurs hommes en même temps ». La partie civile s'étrangle : Max R. n'avait pas fait état de ces éléments lors de l'enquête.

À propos des accusations de viol : « Je n'ai pas le souvenir qu'elle disait avoir été violée ». Le président lui lit un procès-verbal, où il parlait bien de viol. Il dit aujourd'hui que selon ce que lui aurait rapporté Emily Spanton, « elle a eu des relations sexuelles avec un certain nombre [de policiers, NDLR]. [...] Elle était en colère après le sexe, parce qu'on lui avait juste demandé de partir et qu'on ne l'aidait pas à trouver la sortie, qu'on l'avait un peu abandonnée ».

Des rapports consentis ou imposés ? Le Canadien ne répond pas.

Déclarations « constantes »

Avant lui, la cour a entendu le père d'Emily Spanton, également par vidéoconférence depuis Toronto, mais dans une tout autre tonalité. « Je sais à quel point il est difficile pour les victimes d'être crues. [...] Je suis fier que ma fille ait décidé de mener cette action jusqu'à son terme », dit ce policier à la retraite.

« Je connais ma fille depuis 39 ans, elle n'inventerait jamais une histoire pareille », ajoute-t-il.

Selon M. Spanton, depuis avril 2014, sa fille « a changé ». « Elle s'énerve facilement, elle a du mal à dormir. Elle souffre de stress post-traumatique ».  

Elle avait pour habitude de venir le voir à son travail, au commissariat. « Un soir, elle est venue, mais elle a été incapable de pousser la porte. Emily a grandi avec la police et maintenant elle a peur de la police », a-t-il conclu.  

Lundi matin, la cour a entendu la première policière à laquelle Emily Spanton s'était confiée, environ une heure après les faits dénoncés. Emily Spanton lui avait raconté en anglais avoir suivi un policier rencontré dans un pub, qui travaillait au « 36 » (le 36 Quai des Orfèvres), pour visiter ce lieu mythique alors siège de la police judiciaire.  

« Elle était consentante pour suivre » cet homme au « 36 », mais « pas pour des rapports sexuels », a déclaré Alexandra H.  

« En français, en anglais, elle disait qu'elle avait été violée. C'était très clair », a ajouté la fonctionnaire. Elle parlait alors de trois ou quatre hommes. « Elle est restée constante » dans ses déclarations, a souligné la policière.  

Les accusés, qui encourent 20 ans de réclusion criminelle, nient l'avoir violée. Le verdict devrait être rendu jeudi.