Un très bon flic, un compagnon « galant », qui n'est « pas machiste pour un sou » : un portrait élogieux d'un des deux policiers jugés en France pour le viol d'une touriste canadienne a été dressé vendredi aux assises de Paris, quitte à oublier des éléments bien plus difficiles à assumer.

Au cinquième jour du procès de deux policiers français pour « viol en réunion », la cour s'intéresse à la personnalité des accusés. Pour un expert psychiatre, Nicolas R., 49 ans, et Antoine Q., 40 ans, ne présentent pas de « trouble de la personnalité » et pas non plus de « trouble sexuel ».  

Les deux hommes sont accusés d'avoir violé en avril 2014 une touriste canadienne, très alcoolisée, dans les locaux de la police judiciaire de Paris - situés à l'époque au 36 quai des Orfèvres - après une soirée arrosée dans un pub.

L'enquêtrice de personnalité a dressé, à partir des entretiens qu'elle a passés avec des proches et des collègues d'Antoine Q., un portrait flatteur, un peu lisse parfois, de celui-ci.  

Ce policier a intégré en 2010 la Brigade de recherche et d'intervention (BRI), un service d'élite pour lequel son père a oeuvré entre 1977 et 1984, et qui compte aussi son frère dans ses rangs.

Pour lui, « la famille est au centre de tout ». « Il n'est pas machiste pour un sou », a assuré un ami à cette enquêtrice. « Il a été élevé dans le respect de la femme et de la mère ».  

L'expert a interrogé sa compagne avec qui il est depuis 2005 et avec laquelle il a un enfant. Celle-ci a parlé d'un « couple très soudé », d'un père « très aimant », « un homme très galant, élégant ». Antoine Q. a eu du mal à cacher son émotion en entendant cela.

« C'est une femme hypercourageuse. La preuve, c'est qu'elle me soutient », a dit l'accusé à la barre.  

Mais celle-ci, explique-t-il, n'est pas au courant de toute l'affaire, et en particulier de son infidélité. « Malheureusement, elle va savoir » après cette audience, admet-il.

« Torture permanente »

L'accusé ne lui a pas parlé des baisers qui auraient été échangés en allant acheter des cigarettes avec Emily Spanton, la victime présumée du viol. Il a reconnu pendant l'enquête des caresses sexuelles dans la voiture, sur le chemin des locaux de la police, avec cette dernière. De cela non plus, il n'a pas parlé à sa compagne. Mais « je lui ai dit toute la vérité sur tout le reste », se défend-il.

« Vous lui avez parlé de votre maîtresse ? », l'interroge le président. « Non », répond-il à voix basse. Antoine Q. a eu à deux reprises, à son bureau, des relations sexuelles avec une collègue rencontrée fin 2013. « Je voulais visiter les bureaux de l'antigang [l'ancien nom de la BRI] et en pleine nuit, nous avons couché ensemble au bureau », a raconté cette policière lors de l'enquête. Elle se souvient d'une « relation tendre et romantique ».

C'était, assure l'accusé, la première fois qu'il trompait sa femme et il n'a, à part cette fois-là, « pas amené de femme au "36" pour des relations sexuelles ». « C'était à sa demande. [...] C'était un fantasme ».  

Après le viol présumé d'Emily Spanton, Antoine Q. a été suspendu puis sanctionné en conseil de discipline. « Mon monde s'est écroulé », raconte-t-il, évoquant une « torture permanente ». Des chances d'intégrer la BRI, « je n'en aurai plus ». « Cette profession, c'est ma vie », explique-t-il.

Antoine Q. a repris le travail en juillet 2017, à la Brigade d'exécution des décisions de justice, « la Brigade des fugitifs » qui est chargée de rechercher et interpeller des personnes condamnées qui se soustraient aux décisions de justice. « Il obtient de très bons résultats, il est apprécié », a expliqué à la cour sa nouvelle chef, qui a voulu « lui donner une chance ».  

La cour s'intéresse vendredi après-midi à la personnalité du second accusé, Nicolas R.