Le Rassemblement National (RN) de Marine Le Pen a lancé dimanche sa campagne pour les élections européennes, ses voiles gonflées par la colère des gilets jaunes contre Emmanuel Macron et par la poussée des formations populistes en Europe, espérant réitérer sa victoire électorale de 2014.

La finaliste d'extrême droite de l'élection présidentielle française de 2017 a dévoilé dans l'après-midi une partie de sa liste qui sera conduite par un très jeune homme, Jordan Bardella, 23 ans, mais militant de longue date et fidèle de Mme Le Pen.

Crédité de jusqu'à 24 % des intentions de vote, devant La République en Marche (LREM) d'Emmanuel Macron, « le RN [ancien Front national] a un boulevard devant lui », juge le sociologue Sylvain Crépon.

Il ne cesse de progresser dans les sondages et est devenu selon une étude de l'Ifop celui qui « incarne le mieux l'opposition » au chef de l'État, en grande difficulté face à la pression des gilets jaunes qui dénoncent depuis deux mois la politique fiscale et sociale du gouvernement.

Le RN bénéficie aussi du piètre état des autres partis traditionnels.

De plus, un peu partout sur le continent européen, les électeurs manifestent une défiance croissante envers les partis de pouvoir traditionnels. Le Brexit tourmente également toute l'Europe et celle-ci peine à faire face de manière cohérente à la pression migratoire.

« Dans le contexte de la saine révolte des gilets jaunes », les élections européennes seront « l'occasion de dénouer la crise politique née de l'aveuglement, de l'intransigeance, du mépris de classe, de la spoliation fiscale », a lancé Marine Le Pen devant quelque 2000 militants.

Le parti d'extrême droite semble être un de ceux qui peut le plus profiter de cette révolte, même si le mouvement des gilets jaunes, né hors de toute cadre traditionnel, n'est pas structuré et se caractérise surtout par son rejet du personnel politique et des structures de pouvoir dans leur ensemble (partis, syndicats...). Mme Le Pen a d'ailleurs adopté jusqu'ici une posture prudente vis-à-vis du mouvement, évitant d'essayer de le récupérer de manière ouverte.

« Nous avons quatre mois pour faire campagne, pour transformer cette révolte populaire en une révolution du bon sens », a déclaré M. Bardella lors d'un discours où il a également dénoncé l'immigration, un des thèmes fétiches du RN.

Hors de France, Emmanuel Macron est souvent présenté comme le champion du camp du libéralisme politique face aux leaders populistes et illibéraux comme Viktor Orban en Hongrie ou Luigi Di Maio et Matteo Salvini qui animent la coalition au pouvoir en Italie.

« Vitesse grand V »

« Aujourd'hui, c'est Macron qui est totalement isolé sur la scène européenne. L'Europe est en train d'évoluer à la vitesse grand V », a jugé M. Bardella dans un entretien au journal Le Parisien, alors que M. Macron ne peut pas réellement compter sur son alliée historique, la chancelière allemande Angela Merkel, dont le départ programmé du pouvoir est prévu au plus tard pour 2021.

« L'arrivée au pouvoir de nos alliés souverainistes en Europe a fait bouger les choses. Nous irons avec eux devant les instances de la Commission pour récupérer les quatre leviers de souveraineté qui nous apparaissent essentiels : la maîtrise de nos frontières, de notre budget, de notre économie et notre souveraineté législative », espère-t-il.

Le groupe des 24 élus RN au Parlement européen issu du scrutin de 2014 a fondu à 15, notamment après l'échec de la présidentielle de 2017, qui a provoqué le départ de plusieurs députés.

« Nous avons toutes les raisons de faire mieux qu'en 2014 », quand le FN était arrivé victorieux avec 25 % des voix, assure Philippe Olivier, conseiller de Marine Le Pen.