(Podgorica) Trois responsables de l’opposition pro-serbe ont été arrêtés après des incidents qu’ils ont provoqués dans la nuit de jeudi à vendredi pour tenter d’empêcher l’adoption d’une loi dénoncée par l’Église orthodoxe serbe (SPC) prévoyant des nationalisations de biens détenus par des églises.

Les trois responsables du Front démocratique (FD), Andrija Mandic, Milan Knezevic et Milun Zogovic sont soupçonnés d’avoir «agressé un officiel dans l’exercice de ses fonctions et d’avoir empêcher un policier d’exercer ses fonctions».

Vingt-deux personnes en tout, 17 députés d’opposition et cinq autres personnes, ont été interpellées en lien avec ces incidents, a annoncé la police vendredi. Depuis, 19 ont été remises en liberté après interrogatoires.

L’Église orthodoxe serbe (SPC), principale institution religieuse du Monténégro, a dénoncé cette loi sur «la liberté religieuse» qu’elle a qualifié de «discriminatoire et non-constitutionnelle».

AFP

Des membres de l'Église orthodoxe serbe manifestent en silence devant le Parlement.

«Les arrestations, les violences contre les citoyens qui manifestaient dans tout le pays, les divisions inimaginables et la haine ont introduit le Monténégro dans une situation qui ne peut apporter rien de bien à quiconque. Les croyants orthodoxes attendent un des plus durs Noël de la nouvelle histoire du Monténégro», a annoncé l’église dans un communiqué.

La loi, qui a été adoptée par la majorité, prévoit la nationalisation des biens dont les églises ne peuvent pas prouver qu’ils leurs appartenaient avant 1918. À cette date, le Monténégro avait perdu son indépendance et avait été intégré au royaume des Serbes, Croates et Slovènes.

L’adoption de cette loi vise à mettre en œuvre une spoliation de monastères et d’églises, accuse la SPC, qui possède des centaines de monastères et des milliers de mètres carrés de terres dans ce petit État balkanique où 72% des 620 000 habitants sont orthodoxes.  

Tout au long des débats au Parlement jeudi, les députés du FD, avaient menacé de provoquer des incidents, voire de prendre les armes, si la loi était adoptée. Ils avaient appelé leurs sympathisants à bloquer les routes dans tout le Monténégro et à sortir dans les rues.

Après le rejet de leurs amendements par la majorité, les députés du FD ont jeté un pétard dans la salle du Parlement ainsi que des bouteilles en plastique, vandalisé du mobilier et des micros et tenté de s’en prendre physiquement aux députés de la majorité, selon un photographe de l’AFP sur place.

Après ces incidents et l’interpellation des députés de l’opposition, ceux de la majorité ont adopté la loi avec 45 voix pour.

PHOTO SAVO PRELEVIC, AFP

Un manifestation d'Orthodoxe a été étroitement surveillée par la police à Podgorica.

Le premier ministre Dusko Markovic a déclaré après l’adoption de la loi ne pas s’attendre «à une radicalisation de la situation» dans le pays.

Des tensions ont marqué la journée de jeudi au Monténégro. À Podgorica, le centre-ville était bloqué par la police pour empêcher des manifestants et membres de la SPC d’approcher le Parlement.  

Vendredi, la SPC au Monténégro a annoncé qu’un de ses évêque et deux croyants ont été battus dans le nord du pays, les deux croyants souffrant de fractures. L’information n’a pas été confirmée de sources policière.

L’affaire est d’autant plus délicate que le président du Monténégro Milo Djukanovic a affiché son soutien au «renouveau» de l’Église autocéphale orthodoxe du Monténégro, qui tente une refondation depuis 1993 et qui n’est pas reconnue par les églises orthodoxes.

Le Monténégro est une ancienne République de l’ex-Yougoslavie devenue indépendante de la Serbie en 2006.