(Paris) La grève dans les transports en commun perdurait vendredi en France, face à un gouvernement déterminé à poursuivre sa réforme des retraites, « historique » selon Emmanuel Macron, tout en tentant de ménager les syndicats conviés à des discussions la semaine prochaine.

La mobilisation pourrait se prolonger jusqu’à Noël malgré l’invitation au dialogue du gouvernement, qui a dévoilé mercredi le contenu de son projet, suscitant la colère de l’ensemble des syndicats, y compris de ceux qui soutenaient jusqu’alors le principe de la réforme.

« C’est une réforme de refondation avant toute chose », a déclaré vendredi le président français, évoquant un projet « historique pour le pays », en réponse à des questions insistantes de la presse à Bruxelles. M. Macron est resté très discret depuis le début du mouvement le 5 décembre, laissant son premier ministre Édouard Philippe en première ligne.

S’il veut relancer la concertation pour tenter de sortir du blocage et a déjà assoupli les projets initiaux de réforme, Édouard Philippe n’en reste pas moins déterminé à instaurer un « système universel de retraite » par points pour remplacer les 42 régimes actuels.

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Le président Emmanuel Macron et le premier ministre Édouard Philippe

Mais, a-t-il averti, « la seule solution est de travailler un peu plus longtemps […], comme c’est le cas partout en Europe ». Si l’âge légal de départ à la retraite reste fixé à 62 ans, le projet prévoit « un âge d’équilibre » progressivement amené à 64 ans et « un système de bonus-malus » pour inciter à travailler plus longtemps.

Inacceptable pour les syndicats qui ont promis d’amplifier le mouvement. La « ligne rouge est franchie », pour Laurent Berger, numéro un du premier syndicat de France, la CFDT. Favorable au principe d’un régime universel de retraite, la CFDT refuse absolument l’instauration d’un âge d’équilibre à 64 ans.

« Je suis prêt à discuter, évidemment qu’on va discuter », a toutefois déclaré M. Berger, qui n’en a pas moins appelé à manifester mardi aux côtés des organisations qui réclament le retrait du projet.

Après avoir échangé par téléphone avec les partenaires sociaux jeudi, M. Philippe « a confirmé sa proposition de dialogue pour continuer à améliorer le projet porté par le gouvernement », ont expliqué ses services.  Des discussions doivent se tenir « le plus tôt possible la semaine prochaine ».

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Pas de trêve de Noël

Vendredi, les syndicats des enseignants, également très mobilisés par crainte de perdre une grosse partie de leur pension, ont en outre été reçus par le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer.  

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People wait in a corridor of the Pyramide subway station in Paris on December 13, 2019. - French commuters endured a ninth day of public transport strikes Friday, with little relief expected in coming days as unions vow to keep up their protest against a pension overhaul through the holidays unless the government backs down. (Photo by Aurore MESENGE / AFP)

« Des enjeux précis » ont été « posés sur la table » mais « il nous manque encore des précisions et nous maintenons notre appel à la mobilisation mardi », a expliqué à l’AFP Stéphane Crochet, de SE-Unsa, à la sortie du ministère.

De son côté, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a confirmé que les policiers pourraient partir plus tôt à la retraite grâce à la prise en compte de « la dangerosité » de leur métier.

Pendant ce temps, les difficultés continuent pour les usagers de la région parisienne, avec toujours neuf lignes du métro fermées. Un quart des trains à grande vitesse et de banlieue circulent.

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Les passagers du RER devaient s'entasser dans les wagons à la Gare du Nord.

« Je fais 10 km par jour en ce moment ! […] Il faut mettre des bonnes chaussures… parce que ça va durer leur truc ! », confie Alain, qui travaille sur les Grands boulevards parisiens.

Le trafic ferroviaire restera très perturbé tout le week-end. La perspective de voir les trains circuler normalement pour les congés de Noël s’éloigne de plus en plus, les syndicats de cheminots restant déterminés dans leur refus de la réforme.

Face à cette nouvelle fronde sociale, le président Emmanuel Macron, qui a fait de la « transformation » du pays la raison d’être de son quinquennat, joue gros.

Le contexte social est déjà tendu en France, avec le lancement il y a plus d’un an du mouvement des gilets jaunes, mais aussi des mécontentements exacerbés dans les hôpitaux ou parmi les policiers.

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Des employés de l'hôpital La Pitié-Salpêtrière ont manifesté vendredi matin.