(Toulouse) Quelques milliers de gilets jaunes ont de nouveau manifesté en France pour le 22e samedi consécutif, indifférents aux prochaines annonces du président Emmanuel Macron, censées mettre un terme à une crise sociale qui dure depuis près de cinq mois.

Le recul de la mobilisation observé la semaine dernière semblait se confirmer, notamment à Paris avec un cortège clairsemé. Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, régulièrement contestés par les gilets jaunes, les manifestations ont rassemblé 31 000 personnes en France, dont 5000 à Paris.

La semaine dernière, « l’acte 21 » avait rassemblé 22 300 personnes dans les rues, selon le ministère, soit le plus faible chiffre officiel depuis novembre. Sur la page Facebook du « Nombre jaune », les gilets jaunes revendiquaient bien plus du triple.  

« Le grand débat, grand blabla », « Macron on n’attend rien de vos annonces », pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants dans la capitale, où les forces de l’ordre ont procédé à 15 interpellations et 5885 contrôles préventifs, selon la préfecture.

À Toulouse (sud-ouest), « capitale » du mouvement ce samedi, la tension est un peu montée entre le cortège et les forces de l’ordre, qui ont lancé gaz lacrymogènes et grenades assourdissantes pour réduire le périmètre de la manifestation, interdite au centre-ville.

PHOTO PASCAL PAVANI, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un manifestant s'apprête à lancer une pierre lors d'affrontements avec les policiers dans les rues de Toulouse.

En début d’après-midi, dans le centre, une remorque de chantier et une camionnette ont été incendiées.

« Manifester est un droit fondamental et doit le rester », affirmait une banderole en tête du petit cortège de Bordeaux, autre ville du sud-ouest, où de très nombreux axes menant au centre-ville avaient été bloqués par les forces de l’ordre.

« Résistance ! », « Liberté ! Liberté de manifester ! », scandaient les quelque 1800 contestataires à Montpellier (sud).

Les manifestations de ce samedi étaient les premières depuis l’entrée en vigueur de la loi anticasseurs, instaurant notamment un délit de dissimulation du visage dans les manifestations.

Ce texte a été adopté le mois dernier dans le contexte de violences ayant émaillé les manifestations de gilets jaunes depuis le début du mouvement. Début décembre notamment, les images de chaos dans Paris et sur la célèbre avenue des Champs-Élysées avaient fait le tour du monde.

Il a été partiellement censuré par le Conseil constitutionnel, mais il était également dans le collimateur des manifestants parisiens samedi, réclamant l’abrogation intégrale de cette « loi liberticide ». La loi « va ouvrir la voie à des dérives de la part de la police », s’est indignée Sophie Tissier, une manifestante dans la capitale, tandis qu’un autre dénonçait un « État répressif ».

Régulièrement imposées depuis la mi-mars, les interdictions partielles de manifester ont été édictées dans certaines villes. À Paris, les Champs-Élysées étaient de nouveau interdits aux manifestants.

« Pas de seconde chance »

Les rassemblements interviennent en tour de chauffe d’une nouvelle « grande journée » promise par les gilets jaunes le 20 avril, après les annonces attendues d’Emmanuel Macron dans les prochains jours.

Après plus de deux mois de consultation nationale, le chef de l’État doit en effet annoncer des mesures « puissantes » et « massives », selon l’exécutif, pour tenter d’apaiser le mouvement social, né à l’origine d’un ras-le-bol fiscal. La présidence n’a dévoilé ni la date exacte ni le format de cette prise de parole.

Plusieurs pistes sont évoquées, telles une baisse de l’impôt sur le revenu, une réindexation des petites retraites sur l’inflation, ou encore des réformes plus symboliques comme la suppression ou la réforme de l’ENA, école de formation des élites de l’État, la suppression des avantages des anciens présidents et ministres…  

Reste à savoir si elles suffiront à sortir de la crise. Le président Macron « n’aura pas de seconde chance », a estimé samedi le président de droite du Sénat, Gérard Larcher, dans un entretien au Figaro.

« Les réponses ne pourront pas être uniquement cosmétiques ou purement institutionnelles. Il lui faudra faire preuve de pédagogie dans ses choix, présenter un calendrier et une méthode. Les Français ont besoin de confiance et de rassemblement, d’un nouveau souffle et pas de “coups” », a-t-il ajouté.