Moins de 40 000 manifestants en France, dont 2000 seulement à Paris, et des blocages levés aux frontières : la fronde des gilets jaunes a marqué le pas samedi lors d'une nouvelle journée d'action émaillée de violences de ce mouvement, endeuillé par une dixième mort dans la nuit.

Ce sixième samedi de manifestations a rassemblé 38 600 personnes sur l'ensemble de la France à 18 h, contre 66 000 samedi dernier à la même heure, selon le ministère de l'Intérieur. 220 personnes ont été interpellées, dont 81 ont été placées en gardes à vue.

A Paris, la préfecture de police a compté 2000 manifestants à la même heure, contre près de 4000 au pic de samedi dernier, selon une source policière. 142 personnes y ont été interpellées, dont 19 placées en garde à vue.

Des motards de la police ont été pris à partie par des manifestants sur les Champs-Elysées, conduisant le porte-parole du gouvernement Benjamin Grivaux à dénoncer le fait qu'« on lynche » des policiers. Derrière les violences qui ont marqué les manifestations de samedi, il y a « un seul visage, lâche, raciste, antisémite, putschiste », a-t-il dénoncé.

Il faisait également référence à des images sur des réseaux sociaux d'une vingtaine de « gilets jaunes » entonnant devant la basilique parisienne du Sacré Coeur à Montmartre « la quenelle de Dieudonné » sur le chant des Partisans, allusion au polémiste Dieudonné M'Bala M'Bala, condamné plusieurs fois pour des propos racistes et antisémites.

Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a lui aussi fustigé « certains (qui) continuent à venir manifester, animés par la haine des institutions », tout en observant « un réel tassement de la mobilisation ».  

Le mouvement, qui a débuté il y a un peu plus d'un mois, a connu un nouvel essoufflement. La première manifestation, le 17 novembre, avait rassemblé 282 000 manifestants sur l'ensemble de la journée. Ils n'étaient plus que 166 000 le 24 novembre, 136 000 les 1er et 8 décembre et 66 000 le 15 décembre, selon des chiffres officiels (les « gilets » ne donnent pas d'estimation).  

Les « gilets jaunes » les plus déterminés avaient malgré tout appelé à une nouvelle mobilisation ce samedi, et ce en dépit du vote au parlement des mesures d'urgence de 10 milliards d'euros destinées à alléger la pression fiscale et accroître le pouvoir d'achat, revendications phares des « gilets ».

« A deux jours de Noël, je trouve que c'est pas mal » comme mobilisation, a déclaré à l'AFP sur les Champs-Elysées Frédéric, 46 ans et cheveux grisonnants.  

Un dixième mort

Jean-Philippe et Jennifer, des Belges vivant dans le nord de la France, sont venus « pour qu'Emmanuel Macron dégage ». « Ce qui m'a plu, c'est que les gens ont commencé par la taxe carburant, et fini par se dire qu'il fallait être sur un pied d'égalité, que 1 % ne pouvait pas gouverner 99 % », expliquent-ils.

De nombreuses actions ont par ailleurs eu lieu en régions, comme chaque jour, avec des blocages de « gilets jaunes » plus ou moins longs aux frontières avec l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne.

Des centaines de « gilets jaunes », rassemblés au péage du Boulou, le dernier avant la frontière espagnole dans l'est des Pyrénées, ont laissé passer les voitures mais bloqué les poids lourds, « symboles des importations espagnoles vers la France à des prix bradés depuis de longues années », a indiqué à l'AFP Marcel, un viticulteur de 49 ans.

« Le roi Macron donne des miettes aux gueux », « Le mépris ça suffit », pouvait-on lire sur leurs banderoles. Des dizaines de militants séparatistes catalans, vêtus de « gilets jaunes » et brandissant le drapeau indépendantiste, se sont joints aux protestataires français.  

Deux journalistes de la chaîne publique France 2 Montpellier (sud) ont déclaré à l'AFP avoir été « violemment » agressées samedi par des manifestants lors de ce rassemblement.

Non loin de là, à Perpignan (sud), un automobiliste est mort dans la nuit de vendredi à samedi, après avoir percuté un camion bloqué à un barrage filtrant de « gilets jaunes ».

Dans l'après-midi, les forces de l'ordre sont intervenues et ont délogé les manifestants, qui se sont alors massés sur un pont pour jeter des objets sur l'axe routier avant d'être chassés avec des gaz lacrymogènes, selon un photographe de l'AFP.  

Des perturbations de la circulation ont également été signalées à la frontière belge, et un barrage de 200 manifestants a entraîné le blocage de la circulation sur l'autoroute au poste frontière avec l'Italie de Vintimille.

A Strasbourg, une centaine de « gilets jaunes » ont bloqué la route d'accès au pont de l'Europe, frontalier avec l'Allemagne, avant d'être délogés par les forces de l'ordre.  

Par ailleurs, une centaine de gilets jaunes ont manifesté à Bruxelles « assez calmement », contre 400 à 500 la semaine dernière, a indiqué la porte-parole de la police de Bruxelles, Ilse Van de Keere.