La première ministre britannique a estimé jeudi que les négociations sur le Brexit étaient à un moment « crucial », à trois jours d'un sommet qui doit sceller l'accord de retrait et la déclaration politique sur la relation future entre l'UE et le Royaume-Uni.

« Les négociations sont maintenant à un moment crucial », a déclaré Theresa May devant les députés britanniques. « Tous nos efforts doivent être concentrés sur la collaboration avec nos partenaires européens afin de mener ce processus à terme, dans l'intérêt de tous les citoyens ».

Le sort de l'enclave de Gibraltar et la question des futurs droits de pêche des Européens dans les eaux britanniques font partie des principaux problèmes restant à résoudre pour conclure ces tractations d'une complexité inédite, à environ quatre mois du départ britannique, prévu le 29 mars 2019.

« La souveraineté britannique à Gibraltar sera protégée » après le Brexit, a ajouté la dirigeante britannique, au lendemain d'une discussion téléphonique avec le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez.

L'Espagne a menacé de s'opposer à tout accord sur le Brexit dimanche si elle n'obtient pas que soit inscrit noir sur blanc qu'elle disposerait d'un droit de veto sur les négociations futures concernant l'enclave britannique. Ce à quoi le chef de l'exécutif de Gibraltar a répliqué que Madrid brandissait le « fouet » dans les discussions.  

Theresa May a également abordé la question sensible du futur accès des flottes européennes aux eaux territoriales du Royaume-Uni. Certains pays européens comme la France insistent pour que l'accès au marché européen du poisson pêché par les Britanniques soit lié à l'accès aux eaux territoriales britanniques pour les Européens.

« Nous avons rejeté tout lien entre l'accès à nos eaux territoriales et l'accès aux marchés », a-t-elle dit. « Nous négocierons l'accès et les quotas sur une base annuelle, comme le font d'autres États côtiers indépendants », a-t-elle ajouté, citant la Norvège et l'Islande.

« Partenariat ambitieux »

Au lendemain d'une visite éclair de Mme May à Bruxelles, un projet de « déclaration politique » de 26 pages, préparé par les deux équipes de négociateurs, a été transmis jeudi aux capitales européennes.

Ce texte a été « convenu au niveau des négociateurs et accepté en principe au niveau politique, sous réserve de l'approbation des dirigeants » lors du sommet européen exceptionnel de dimanche, a annoncé le président du Conseil européen Donald Tusk.

Le document sera joint au « traité de retrait » du Royaume-Uni, de 585 pages, qui détricote les liens noués pendant plus de 40 ans d'adhésion du Royaume-Uni et a fait l'objet d'un accord la semaine dernière.

Cette déclaration politique, consultée par l'AFP, « établit les paramètres d'un partenariat ambitieux, large, approfondi et flexible » en matière de commerce, de politique étrangère, de défense et de sécurité. Mais contrairement au traité, même si elle revêt une forte portée politique, pour fixer le cadre de négociations qui ne pourront démarrer qu'après le Brexit, programmé fin mars 2019.

Les deux équipes de négociations sont aussi convenues que la période de transition post-Brexit pourra être prolongée jusqu'à deux ans après la fin 2020, la date initialement prévue dans le traité de retrait.

Pendant cette transition, le Royaume-Uni continuera d'appliquer les règles de l'UE et d'y contribuer financièrement, sans cependant participer aux décisions, au grand dam des partisans britanniques d'une rupture nette et rapide.

L'annonce de ces progrès a fait bondir la livre britannique face au dollar, mais a également entraîné des commentaires acerbes au sein même de la majorité conservatrice de Theresa May.

« L'accord de retrait ne passera jamais l'étape de la Chambre des communes », a réagi le député tory Mark François, membre du European Research Group, un groupe de députés conservateurs eurosceptiques.  

« Équilibre délicat »

Theresa May retournera samedi à Bruxelles pour finaliser les négociations, à la veille du sommet.

Plusieurs pays européens parmi les 27 avaient insisté en coulisses pour que les négociations accélèrent et que les capitales disposent d'un temps suffisant pour examiner les textes, faute de quoi le sommet pourrait être reporté selon des diplomates.

« La France et l'Allemagne sont d'accord : il ne doit pas y avoir de négociations lors du Conseil européen (dimanche) et les textes doivent donc être prêts à l'avance », a expliqué une source diplomatique.

« C'est un équilibre délicat à trouver », a déclaré une autre source diplomatique. Les 27 ne veulent pas d'un texte transmis « au dernier moment », mais ils « comprennent bien que Mme May a besoin d'un peu de dramaturgie pour montrer qu'elle a négocié jusqu'au bout ».