« Dialogue », mais « constance et détermination » : le gouvernement tentait mardi de mettre fin au mouvement des « gilets jaunes », dont il a déploré la « radicalisation » au quatrième jour d'actions ciblant notamment autoroutes et dépôts pétroliers.

Les forces de l'ordre se sont employés mardi à libérer l'accès à des dépôts et péages dans plusieurs régions, dans un climat parfois tendu. Une vingtaine de sites « stratégiques » ont ainsi été débloqués dans la journée, a indiqué le ministère de l'Intérieur.

« C'est dans le dialogue qu'on peut en sortir, dans l'explication, dans la capacité à trouver à la fois le bon rythme et les solutions de terrain », a déclaré mardi le chef de l'État, Emmanuel Macron, dans sa première réaction depuis le début de ce mouvement protéiforme samedi.

« Nous gagnerons par la cohérence, la constance et la détermination », a de son côté assuré le premier ministre Édouard Philippe.

Plus tôt dans la journée, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner a dénoncé la « dérive totale » des manifestations, pointant une « radicalisation » et « un très, très grand nombre de blessés ».  

Depuis le début de cette mobilisation contre la hausse des prix du carburant qui a essaimé hors de tout cadre syndical ou politique, les manifestations ont fait un mort, quelque 530 blessés, dont 17 graves.  

Aucun chiffre officiel sur le nombre de participants n'était disponible mardi après-midi, mais une source policière évoquait quelque 10 500 manifestants à travers la France en début de matinée. Ils étaient 27 000 lundi, 290 000 samedi.  

« Le mouvement ne s'essouffle pas », a assuré à l'AFP Olivier Garrigues, ouvrier agricole de 38 ans mobilisé dans la région toulousaine. « Bien sûr, on est moins nombreux, car les gens travaillent », concède-t-il : « Mais on est solidaire, on s'organise. Ceux qui travaillent le matin reviennent l'après-midi et vice-versa. »

Le mouvement a reçu mardi le soutien de la fédération FO des transports et de la logistique, troisième organisation du secteur, qui a invité ses adhérents et sympathisants à se joindre aux « gilets jaunes » pour obtenir une « augmentation du pouvoir d'achat ».  

Les actions ont parfois donné lieu à des violences et dégradations.  

À Langueux (Côtes-d'Armor), six personnes ont été interpellées dans un centre commercial dans la nuit pour des jets de projectiles sur les forces de l'ordre, selon le parquet de Saint-Brieuc.

Au péage de Virsac (Gironde) sur l'A10, un des points de blocage les plus durs mardi, des manifestants « ont saccagé et mis le feu aux installations, entraînant des dégâts matériels très importants », selon Vinci Autoroutes, qui a annoncé porter plainte.

Sur l'île de la Réunion, où 35 barrages étaient encore dressés à la mi-journée, un couvre-feu partiel a été instauré dans la moitié des communes après une nouvelle nuit de violences.

« On ne s'arrête pas »

Les accès à plusieurs dépôts de carburants (Lucciana, Frontignan, Cournon d'Auvergne, Port-la-Nouvelle, Vern-sur-Seiche, Lespinasse...) ont été débloqués.

Plusieurs barrages routiers ont également été évacués notamment à Caen, où les forces de l'ordre ont eu recours à des gaz lacrymogènes, et sur l'A16 à Calais.

D'autres barrages - bloquants ou filtrants - et des opérations escargot persistaient néanmoins, à proximité de péages, échangeurs et ronds-points.

Dans un point de situation à 15 h, Vinci relevait notamment des perturbations sur les autoroutes A7, A8, A10, A11, A62, A71. Dans plusieurs départements, des échangeurs ont été fermés sur décision préfectorale.

Le mouvement pourrait se poursuivre ces prochains jours, avant un rendez-vous fixé à Paris samedi pour l'« acte 2 » du mouvement.

« On ne s'arrête pas parce que le gouvernement ne veut pas faire marche arrière. On va rester là jusqu'à samedi ou dimanche », affirme Brice Telki, qui participe aux actions sur l'autoroute A47, dans la Loire.

Interpellé à l'Assemblée, Édouard Philippe a assuré n'avoir « aucune intention de réprimer ou de diminuer la liberté d'expression et la liberté de manifestation ». « Mais nous voulons que cette liberté d'expression et de manifestation s'exprime dans le cadre de la loi », a-t-il déclaré.

Ce mouvement sans leader connu est soutenu par près des trois quarts des Français, selon plusieurs sondages. D'abord concentrés sur la hausse du prix des carburants, les motifs de griefs se sont ensuite élargis à une dénonciation plus globale de la taxation et de la baisse du pouvoir d'achat.