Emmanuel Macron a présenté mardi une réforme censée renforcer l'offre de soins «pour les 50 années à venir» avec un investissement de 3,4 milliards d'euros d'ici à 2022 et la suppression du numerus clausus en 2020.

«Notre système de santé ne souffre pas d'abord d'un problème de sous-financement. Il pêche par un vrai handicap d'organisation», a estimé le chef de l'État qui a souligné le «risque d'implosion» de l'hôpital.

Urgences «engorgées», psychiatrie «en crise», étudiants en médecine «qui souffrent»: après les diagnostics alarmants posés ces derniers mois, M. Macron a présenté sa réforme comme «un des piliers» de «l'État-providence du XXIe siècle» qu'il avait déjà voulu «refonder» lors de la présentation de son plan de lutte contre la pauvreté, il y a moins d'une semaine.

Baptisé «Ma santé 2022», cet acte II de la rentrée sociale du président comporte une cinquantaine de mesures, dont la suppression de l'emblématique numerus clausus et de la première année commune aux études de santé.

Le redoutable concours qui a traumatisé des générations d'étudiants en santé, qualifié d'«absurdité» par le président, ainsi que les quotas de places en médecine, pharmacie, dentisterie et maïeutique (sages-femmes), auront disparu en 2020.

«Regagner du temps médical»

Le symbole est fort, mais ne produira ses effets qu'à long terme. Dans l'immédiat, l'exécutif veut «regagner du temps médical» et va mettre la main à la poche pour y parvenir.

Les crédits de l'assurance maladie augmenteront de 2,5% l'an prochain, au lieu des 2,3% prévus, soit près de 400 millions d'euros supplémentaires. Le plan global sera doté d'un budget de 3,4 milliards d'euros d'ici 2022, a indiqué le ministère de la Santé à l'AFP.

Dans le détail, près de 1,6 milliard d'euros seront consacrés à «la structuration des soins dans les territoires», 920 millions à l'investissement hospitalier, 500 millions à la «transformation numérique» et 420 millions à «l'évolution des métiers et des formations».

Une rallonge qui financera aussi la création de 4000 postes d'«assistants médicaux», censés «décharger» les médecins des tâches administratives et de certains actes simples. M. Macron en a promis «autant que de besoin», afin d'inciter les médecins à travailler en groupe ou au sein d'une équipe de soins.

Avec ce temps médical «regagné», ils seront priés d'accepter de nouveaux patients et d'assurer des consultations sans rendez-vous en journée, jusqu'à 20h. En revanche, le président s'est refusé à recourir à la «contrainte» pour obtenir des tours de garde les nuits et les week-ends.

Au-delà, il souhaite que «l'exercice isolé» de la médecine de ville «disparaisse» d'ici à la fin de son quinquennat.

Fermetures

Dans la même veine, M. Macron a confirmé souhaiter que «dès 2019, 400 postes supplémentaires de médecins généralistes à exercice partagé ville-hôpital puissent être financés et envoyés dans les territoires prioritaires» pour lutter contre les déserts médicaux.

Concrètement, les services d'urgence doivent progressivement être réservés aux «urgences vitales», a avancé le président, en reconnaissant dans les récents dysfonctionnements du Samu qui ont conduit notamment à la mort d'une jeune femme, la responsabilité d'une mauvaise organisation et non des professionnels de santé.

Surtout, la carte hospitalière va être rebattue. «Certaines activités devront fermer», a prévenu M. Macron, en détaillant la réorganisation de l'offre hospitalière en trois catégories.

Un «label» d'hôpital de proximité sera créé, notamment à la faveur des fermetures, pour 500 à 600 établissements qui accueilleront médecine générale, polyvalente, gériatrique et soins de suite, avec des plateaux techniques de biologie, d'imagerie ou de télémédecine.

Les blocs chirurgicaux et les maternités seront regroupés dans les plus gros établissements pour leur assurer une activité plus importante, gage de sécurité pour les patients.

Mais le gouvernement lorgne aussi le gisement d'économies des actes «inutiles», favorisés par la très décriée «tarification à l'activité» (T2A).

Dès 2019, de nouveaux financements seront mis en oeuvre pour des maladies chroniques comme le diabète et l'insuffisance rénale, obligeant hôpitaux et professionnels de santé libéraux à se coordonner et à partager une rémunération forfaitaire.

Le député UDI Philippe Vigier, rapporteur de la commission d'enquête sur l'accès aux soins, a salué la suppression du numerus clausus, mais estimé dans un communiqué que ce plan «souffre de vraies insuffisances et ne permettra pas d'apporter une réponse à la hauteur des drames que vivent les territoires en matière d'accès aux soins».