Affaires mondiales Canada a confirmé vendredi que quatre diplomates canadiens ont été expulsés par la Russie, un pas de plus dans la détérioration des relations entre l'Occident et le Kremlin à la suite du présumé empoisonnement d'un ancien espion et de sa fille.

Dans un courrier, Adam Austen, un porte-parole de la ministre des Affaires étrangères du Canada, a dit que les diplomates avaient été déclarés « persona non grata » par le gouvernement russe. Des démarches sont en cours pour les ramener - eux et leur famille - au pays.

Plus tôt le ministère russe des Affaires étrangères avait annoncé l'expulsion de diplomates issus d'une vingtaine de pays occidentaux, dont le Canada.

Le Canada avait décidé lundi d'expulser quatre diplomates russes.

Selon M. Austen, cette décision avait été prise en « solidarité avec [le] proche alliés du Canada, le Royaume-Uni ». Il a déclaré que cette mesure ne visait pas le peuple russe. Il a ajouté que le Canada « demeure engagé dans le dialogue et la coopération avec la Russie sur les défis auxquels font face les deux pays ».

Ces représailles s'inscrivent dans la crise diplomatique qui oppose la Russie au Royaume-Uni et à plusieurs membres de l'Union européenne et de l'OTAN, depuis l'empoisonnement en sol britannique d'un ex-espion russe, reproché au Kremlin.

Moscou nie toutefois avec véhémence toute implication dans l'attaque à l'agent neurotoxique perpétrée contre Sergueï Skripal et sa fille, le 4 mars dernier, à Salisbury.

Parmi les autres pays qui verront certains de leurs diplomates déclarés persona non grata figurent l'Australie, les Pays-Bas, l'Allemagne, la France et l'Espagne.

Le Danemark, l'Italie, la Norvège et les pays baltes font aussi partie du lot, entre autres.

Par communiqué, le ministère russe a dit riposter « aux accusations injustifiées » qu'ont lancées ces pays pour montrer la porte à plus de 150 diplomates russes cette semaine.

Guerre diplomatique

Le ministère russe des Affaires étrangères a annoncé vendredi l'expulsion de diplomates issus d'une vingtaine de pays occidentaux.

Les ambassadeurs de 23 pays parmi lesquels la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie, le Canada et la Pologne ont été convoqués au ministère russe des Affaires étrangères, où ils se sont vus notifier les mesures d'expulsion prises à leur encontre de leurs diplomates.

« Il leur a été remis une note disant qu'en protestation aux accusations déraisonnables et aux expulsions de diplomates russes [...], la Russie déclare persona non grata le nombre correspondant d'employés diplomatiques », a annoncé le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.

Concrètement, Moscou répond à l'identique, en expulsant le même nombre de diplomates que chaque pays a expulsé de diplomates russes. Quatre diplomates du Canada, de l'Allemagne et de la Pologne devront, par exemple, quitter la Russie.

Treize diplomates ukrainiens devront également quitter Moscou, un nombre identique au nombre de Russes qui avaient été contraints de quitter Kiev cette semaine.

Seuls quatre pays ayant annoncé des mesures contre la Russie échappent pour l'instant à ces représailles. « Compte tenu du fait que la Belgique, la Hongrie, la Géorgie et le Monténégro ont décidé au dernier moment de rejoindre ce mouvement, la Russie se réserve le droit de prendre des mesures » à l'avenir, a néanmoins déclaré le ministère dans son communiqué.

Moscou a aussi décidé de nouvelles mesures contre la Grande-Bretagne, donnant un mois à Londres pour réduire son personnel diplomatique en Russie et l'amener au même niveau que celui des missions diplomatiques russes au Royaume-Uni.

Le 17 mars, Moscou avait déjà annoncé l'expulsion de 23 diplomates britanniques et ordonné la fermeture du British Council et du consulat britannique de Saint-Pétersbourg.

Vendredi, la Russie s'est défendue d'être responsable de cette « guerre diplomatique » qui s'envenime. « Ce n'est pas la Russie qui a initié un échange de sanctions ou un échange d'expulsion de diplomates », a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

« Actes inamicaux »

Les États-Unis avaient été le premier pays à apprendre, jeudi soir, l'expulsion de 60 de leurs diplomates en réponse aux mesures équivalentes prises par Washington après l'empoisonnement le 4 mars au Royaume-Uni d'un ex-agent double russe, Sergueï Skripal, et de sa fille Ioulia.

L'hôpital où est soignée Ioulia Skripal a indiqué que son état s'améliore rapidement, tandis que son père reste dans un état critique, mais stable.

Londres impute à la Russie cet empoisonnement via un agent neurotoxique, malgré de multiples démentis de Moscou, qui clame son innocence.

Les 60 diplomates américains expulsés « ont été déclarés «personae non gratae» pour activités incompatibles avec leur statut diplomatique » et ont une semaine pour quitter le pays, selon le ministère russe des Affaires étrangères, qui a également ordonné la fermeture d'ici samedi du consulat général des États-Unis à Saint-Pétersbourg.

« Il n'y a aucune justification à la réaction russe », a aussitôt déploré la porte-parole du département d'État américain, Heather Nauert, en assurant que les États-Unis se réservaient « le droit d'y répondre » en examinant différentes options.

« Nous ne sommes pas d'accord avec cette appréciation », a réagi M. Peskov: « La Russie a été obligée de prendre des mesures de rétorsion en réponse aux actes inamicaux et illégitimes » de Washington, a-t-il souligné.

Le président russe Vladimir Poutine « reste partisan du développement de bonnes relations avec tous les pays, y compris les États-Unis », a assuré M. Peskov.

Mesures identiques

Au total, dans le cadre de mesures de rétorsion sans précédent coordonnées entre Occidentaux, plus de 140 diplomates russes en Europe, en Amérique du Nord, en Ukraine ou en Australie doivent être expulsés.

« Pour rétablir la vérité », la Russie a également demandé la convocation d'une « session extraordinaire » du Conseil exécutif de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), selon M. Lavrov, qui a appelé jeudi les Occidentaux à avoir « une conversation honnête » avec les Russes sur l'empoisonnement de Skripal et de sa fille.

« La Russie souhaite une enquête objective et impartiale », a expliqué vendredi Dmitri Peskov, en réaffirmant que Moscou « n'est catégoriquement pas d'accord avec les accusations l'impliquant dans cet incident ».

À Saint-Pétersbourg, ancienne capitale impériale russe, l'évacuation des meubles et des cartons était en cours vendredi au consulat général des États-Unis, à la veille prévue de sa fermeture, a constaté une journaliste de l'AFP.

- Avec Agence France-Presse