La compagne de Radouane Lakdim, le djihadiste qui a tué quatre personnes vendredi dans le sud de la France, a été inculpée mardi par un juge antiterroriste et provisoirement incarcérée, a annoncé une source judiciaire.

Au terme de quatre jours de détention, Marine P., une jeune femme de 18 ans qui s'est convertie à l'islam, a été présentée à un magistrat à Paris qui l'a mise en examen (inculpée) pour «association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d'atteintes aux personnes», a précisé cette source.

Comme son compagnon, la jeune femme était fichée «S» (pour «sûreté de l'État») en raison de sa «fréquentation des milieux islamistes radicaux», selon une source proche de l'enquête.

En détention, Marine P. avait «contesté avoir été associée au projet» de son compagnon mais, à l'évocation des faits, elle n'exprimait «pas un sentiment d'indignation», a rapporté une source proche de l'enquête.

Entretemps, la polémique se développait sur le plan politique au moment où un hommage national doit être rendu mercredi au gendarme tombé en «héros» pour sauver une otage.

Le gouvernement a rejeté en bloc mardi les critiques de la droite et de l'extrême droite, qui se déchaînent depuis les attentats de vendredi à Carcassonne et Trèbes.

«Ceux qui affirment, sans savoir, que cet attentat aurait pu être évité, ceux qui croient pouvoir promettre aux Français un risque zéro, je le dis : ceux-là prennent, dans leur légèreté, une bien lourde responsabilité», a lancé le premier ministre Édouard Philippe devant l'Assemblée nationale.

Dans chacune des deux chambres, députés et sénateurs ont rendu hommage par une minute de silence aux victimes de Radouane Lakdim, un franco-marocain de 25 ans.

Le président Emmanuel Macron prononcera un éloge funèbre, mercredi matin, lors de la cérémonie à la mémoire du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame.

Surmonté de son képi, le cercueil du gendarme est arrivé dans l'après-midi à Paris.

Une minute de silence sera observée mercredi matin dans les gendarmeries, commissariats et préfectures. Dans la soirée, l'évêque aux armées dira une messe à Paris en hommage à Arnaud Beltrame, avant ses funérailles jeudi matin à la cathédrale de Carcassonne.

«Radicalisation latente» 

Les controverses autour du suivi de Radouane Lakdim et des islamistes radicaux, déclenchée par la droite et l'extrême droite, n'ont pas faibli.

«Il n'y a pas pire instrumentalisation que de se cacher derrière un héros pour échapper à sa propre incompétence et à sa propre lâcheté. (...) Il n'y a pas pire mépris à l'égard des victimes que de ne rien vouloir changer», a accusé la présidente du parti d'extrême droite Front national, Marine Le Pen.

Le président des Républicains (droite), Laurent Wauquiez, avait dénoncé lundi une «coupable naïveté» d'Emmanuel Macron, réclamant le rétablissement de l'état d'urgence et l'expulsion des étrangers fichés «S».

Le Premier ministre leur a dit de se «méfie(r) des réponses juridiques rapides». Il existe déjà «un arsenal juridique (...) pour comprendre, suivre, sanctionner», selon lui.

Quant aux députés socialistes, ils ont déploré l'«éternelle rengaine» de la droite et de l'extrême droite.

La dangerosité de Radouane Lakdim a-t-elle été sous-évaluée? Tué vendredi lors de l'assaut du GIGN, un groupe d'élite de la gendarmerie, ce petit délinquant radicalisé de Carcassonne était fiché «S» depuis 2014 et inscrit depuis novembre 2015 au Fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).

La Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) avait envoyé à Lakdim, en mars, une convocation pour un «entretien d'évaluation» et décider d'une éventuelle clôture de l'enquête administrative menée à son encontre depuis mai 2013, selon une source policière.

En mars, le «suivi effectif» de Radouane Lakdim était «toujours en cours mais n'avait pas permis de mettre en évidence des signes précurseurs d'un passage à l'acte», a assuré lundi le procureur de Paris François Molins.

Plusieurs informations parvenues en mai 2014 avaient fait état d'une «radicalisation latente» et de velléités de départ en Irak ou Syrie. Une fiche «S» est alors émise, mais les investigations ne révèlent aucun signe de radicalisation violente.

En septembre 2017, son compte Facebook, attestant un intérêt pour l'idéologie jihadiste, attire de nouveau l'attention de la DGSI, mais les investigations ne donnent aucun résultat probant.

AFP

Radouane Lakdim