La chancelière Angela Merkel a reconnu mardi, à l'occasion du premier anniversaire de l'attentat du marché de Noël de Berlin, les défaillances de l'État allemand pour empêcher l'attaque et dans sa mission de soutien aux victimes.

Mme Merkel avait été critiquée pour son manque d'empathie ces dernières semaines par une partie des proches des 12 morts et de la centaine de blessés.

Elle les a reçus pour la première fois lundi après la publication début décembre d'une lettre ouverte très offensive. La chancelière, visiblement émue et les traits tirés, a qualifié mardi leur échange de «sans ménagement et (comme ayant) démontré les faiblesses de notre État».

«Aujourd'hui doit être non seulement un jour de deuil, mais aussi le jour de (notre) volonté de faire mieux», a-t-elle dit après l'inauguration d'un mémorial aux victimes sur les marches menant à la célèbre église du Souvenir, mitoyenne du marché de Noël dévasté un an plus tôt par le camion-bélier du Tunisien Anis Amri, qui avait agi pour le compte du groupe État islamique.

Le monument forme une cicatrice de bronze et d'or serpentant sur 14 mètres devant l'église. Sur les marches, les noms des victimes ont été gravés. Mardi, des roses blanches y ont été déposées.

Angela Merkel «aurait dû agir un peu plus tôt», estime Susanne Covington, 62 ans. Un leader comme elle devrait être «sur place lorsque quelque chose comme ça arrive», estime cette employée dans un cabinet d'assurances voisin, venue allumer une bougie en mémoire des victimes.

Plus tôt, le président Frank-Walter Steinmeier avait reconnu avant Mme Merkel que le soutien aux victimes avait été «insuffisant» et admis des erreurs des services de sécurité avant l'attaque.

Taxis au frais des victimes 

L'attaque du marché de Noël est l'attentat le plus sanglant jamais commis sur le sol allemand. Aucun hommage national n'a pourtant été organisé.

Un rapport officiel très critique commandé par le gouvernement a aussi dénoncé la faiblesse des indemnisations ainsi que des maladresses administratives choquantes, comme l'envoi aux familles d'injonctions de paiement pour les autopsies des défunts.

Dernier exemple du genre, rapporté par le quotidien Bild mardi, la mairie de Berlin a signifié dans son invitation pour les commémorations adressées aux proches et aux blessés que «le coût d'un taxi ne sera pas remboursé! Les transports en commun doivent être utilisés».

De quoi nourrir la rancoeur des intéressés, qui ont appris aussi ces derniers mois de diverses commissions d'enquêtes qu'Amri aurait pu être arrêté avant son passage à l'acte.

«Ils veulent économiser de l'argent, tout ça est très froid. Ils n'ont même pas essayé de nous écouter, de comprendre nos besoins», assène dans Bild Yaron, beau-frère de Dalia Elyakim, une Israélienne tuée par le poids-lourd.

«Je m'attendais à plus de générosité, surtout que maintenant il est établi que les autorités, l'État, ont commis des erreurs flagrantes», juge dans le même tabloïd une blessée dans l'attentat identifiée comme Silvia B.

Longtemps sous surveillance policière, Anis Amri était resté en liberté, bien que catalogué comme islamiste dangereux et trafiquant de drogue.

Arrivé en Allemagne en 2015 après une peine de prison en Italie, le jeune homme avait profité du chaos administratif provoqué par l'afflux de centaines de milliers de migrants cette année-là pour déposer moult demandes d'asile et obtenir autant de titres de séjour provisoires sous diverses identités.

Après la première partie des cérémonies, achevée à la mi-journée, une prière oecuménique dans la chapelle jouxtant l'église du Souvenir a débuté à 10h30. Plusieurs centaines de personnes y ont prié pour «les nombreux blessés, les proches et les amis qui n'ont pas de mots (car) il n'y a pas de mots pour cet acte». Une autre cérémonie était prévue une heure plus tard.

À 20h02, heure précise de l'attentat, une mer de bougies devait être allumée au pied l'église du Souvenir, dont le clocher partiellement détruit pendant la Seconde Guerre mondiale surplombe les lieux de l'attentat.

Dans un récent entretien, le patron du Renseignement intérieur, Hans-Georg Maassen, a souligné que le pays n'était pas à l'abri d'une nouvelle attaque, alors que quelque 1900 individus y sont soupçonnés de liens avec la mouvance djihadiste.

AP

Anis Amri a été tué au cours d'un contrôle de police «par hasard» à Milan, après quatre jours de chasse à l'homme à travers l'Europe.