Un match pour «faire face ensemble»: trois jours après les attentats en Catalogne, Barcelone espère se raccrocher à sa passion pour le soccer dimanche lors d'une rencontre Barça-Betis Séville chargée d'émotions, entre hommage aux victimes et défi sécuritaire.

Au Camp Nou, les presque 100 000 spectateurs du plus grand stade d'Europe vont respecter une minute de recueillement en mémoire des 14 personnes tuées dans ces attaques, qui ont frappé Barcelone jeudi et la ville balnéaire de Cambrils dans la nuit de jeudi à vendredi.

Longtemps, sous la dictature franquiste (1939-1975), le stade du FC Barcelone a été un exutoire pour les Catalans, qui y retrouvaient une certaine liberté de ton dans une société muselée.

On y criait à l'époque «Liberté!». On y lancera peut-être dimanche le mot d'ordre «Nous n'avons pas peur!», scandé par la foule en deuil rassemblée vendredi sur la place de Catalogne, à deux pas des Ramblas où a eu lieu l'une des deux attaques.

Dans ces «circonstances extraordinaires et lamentables», l'entraîneur barcelonais Ernesto Valverde a affiché samedi sa «solidarité» vis-à-vis des victimes et de leurs familles, fidèle à la devise du Barça, «més que un club» («plus qu'un club»), symbole d'un fort engagement politique, culturel et social en Catalogne.

Avec l'affection de Zidane

«Nous devons faire face ensemble à ces circonstances. La meilleure manière de faire, c'est d'aller de l'avant», a souligné l'austère technicien, conscient de la charge morale qui pèse sur son équipe: communier avec une ville et une région en souffrance.

Soudés derrière leur capitaine, l'attaquant-vedette Lionel Messi, les joueurs barcelonais doivent porter au Camp Nou un brassard noir en signe de deuil et un maillot commémoratif avec le mot «Barcelona» inscrit dans le dos.

Dans le sillage du club catalan, le monde du soccer en Espagne a multiplié les messages de soutien depuis jeudi, mettant de côté les habituels antagonismes et polémiques.

Y compris au Real Madrid, grand rival du Barça: Zinédine Zidane, l'entraîneur du club madrilène, a eu des mots de réconfort pour les victimes et toute la Catalogne. «On pense à eux avec beaucoup d'affection. Dans ces moments-là, c'est tellement dur, on veut juste leur dire haut et fort qu'on pense à eux», a dit samedi le Français.

Au pays du soccer-roi, le report des matches de la 1re journée du Championnat d'Espagne, ce week-end, n'a même pas été envisagé. La Ligue espagnole de soccer a simplement annoncé la tenue d'une minute de silence avant chaque rencontre et dit souhaiter que les rencontres se tiennent «en toute normalité».

Présence policière

Un point de vue partagé par les principaux intéressés. «Dans le monde actuel, nous sommes tous des victimes potentielles à un moment donné, a souligné Valverde. On ne peut pas le contrôler, mais ce qu'on ne peut pas faire, c'est se cacher».

Alors que l'enquête policière est toujours en cours, la tenue de ce match suppose un défi pour des forces de l'ordre déjà très sollicitées ces dernières heures. La rencontre implique le rassemblement potentiel en un même lieu de 99 354 personnes, soit la capacité de l'enceinte barcelonaise.

La police catalane a annoncé la mise en place d'un dispositif renforcé et «adapté au nombre de spectateurs», tout en recommandant aux supporters d'arriver en avance au stade, où tous les sacs seront fouillés minutieusement.

«La présence policière sera davantage visible sur le périmètre extérieur du stade et il y aura la possibilité de contrôles ponctuels visant les personnes et les véhicules», a déclaré samedi un porte-parole des Mossos d'Esquadra, la police catalane. «La recommandation est d'y aller (au stade) avec tranquillité, pour profiter de ce qui reste un match de soccer».

Sur le terrain, le Barça se présentera affaibli par le départ de son attaquant brésilien Neymar et par la blessure de l'avant-centre uruguayen Luis Suarez. Mais Messi, l'idole du peuple catalan, essaiera de rendre un peu le sourire à Barcelone l'endeuillée.