L'Italie a «la conscience tranquille» mais aucune intention de polémiquer au sujet du signalement aux autorités britanniques il y a un an de l'auteur italo-marocain de l'attentat de Londres, a déclaré mercredi le chef de la police italienne, Franco Gabrielli.

«Nous avons la trace du signalement et la conscience tranquille. Mais comme nous avons aussi un grand sens des responsabilités, nous comprenons la souffrance et les difficultés de qui est appelé à gérer une situation aussi compliquée», a déclaré M. Gabrielli en marge d'une réunion de responsables de polices européennes sur l'île italienne de Lampedusa.

L'Italie est dans une situation «plus favorable» que des pays comme le Royaume-Uni, confronté à des signalements «innombrables» et à des sujets plus dangereux.

«Donc dire que nous sommes forts et que d'autres ne le sont pas est un exercice stérile, incorrect et surtout susceptible d'être démenti à tout moment par les faits», a-t-il insisté.

Youssef Zaghba, un Italo-Marocain ayant participé à l'attentat qui a fait sept morts et une cinquantaine de blessés samedi à Londres, avait été arrêté en mars 2016 à l'aéroport de Bologne, dans la région où vit sa mère italienne, alors qu'il s'apprêtait à embarquer pour la Turquie et vraisemblablement la Syrie.

Dans son téléphone, les enquêteurs ont trouvé des prêches musulmans et la trace de consultations de sites jihadistes, des éléments suffisants pour l'inscrire au registre des personnes à risque et le signaler à Londres et à Rabat, mais pas pour l'inculper, a rappelé M. Gabrielli.

Le jeune homme a été étroitement surveillé lors de ses rares passages en Italie, mais selon Scotland Yard, il n'était pas sous le radar des services britanniques.

Interrogé sur la possibilité de durcir la législation pour pouvoir stopper les personnes présentant un profil similaire, le chef de la police italienne s'est montré très réticent.

«Nous ne pouvons pas inculper les personnes simplement parce qu'elles fréquentent certains sites internet. Cela risquerait de donner lieu à des scénarios extrêmement compliqués», a-t-il déclaré.

«La possibilité de tisser des liens, d'échanger des idées et d'évoquer des causes, cela fait partie de nos libertés fondamentales. Nous devons le garder en mémoire, dans un pays qui a réussi à dépasser des situations compliquées sans annuler ses propres libertés, ce dont nous sommes fiers», a-t-il ajouté.

Il faisait apparemment référence aux «années de plomb», de la fin des années 1960 au début des années 1990, quand l'Italie a été secouée par une série d'attentats de droite et de gauche ayant fait plus de 400 morts. Les forces de l'ordre italiennes en ont retiré une expérience aujourd'hui très utile contre les jihadistes potentiels.