Un tribunal turc a rejeté vendredi un recours demandant la fin du blocage de l'encyclopédie en ligne Wikipédia, inaccessible depuis plusieurs jours en Turquie, a rapporté l'agence de presse pro-gouvernementale Anadolu.

Wikipédia, l'un des sites les plus consultés dans le monde, est bloqué depuis samedi par les autorités turques, qui réclament la suppression de certains articles de l'encyclopédie en ligne établissant un lien entre Ankara et des organisations extrémistes.

La fondation Wikimédia, qui héberge plusieurs sites dont Wikipédia, avait déposé un recours mardi en arguant que le blocage de l'encyclopédie contrevenait à la liberté d'expression, selon Anadolu.

Mais un tribunal d'Ankara a rejeté cette demande vendredi, arguant que si la liberté d'expression était bien un droit fondamental, elle pouvait être limitée si les conditions l'exigent, a rapporté Anadolu.

De plus, a affirmé le tribunal, l'état d'urgence en vigueur en Turquie depuis une tentative de putsch en juillet permet de «déroger temporairement» aux dispositions de la Convention européenne des droits de l'Homme liées à la liberté d'expression.

Les autorités turques demandent le retrait de deux articles de Wikipédia qui présentent la Turquie comme «un des acteurs qui ont initié la guerre civile en Syrie et (un État) qui soutient et arme des organisations terroristes», a indiqué le tribunal, cité par Anadolu.

Ces allégations «nuisent à la respectabilité et à la réputation» de l'État turc, a ajouté le tribunal, précisant que Wikipédia avait été bloqué dans son ensemble car il s'était avéré «techniquement impossible» de ne rendre inaccessibles que les deux articles contestés.

Certains critiques du président Recep Tayyip Erdogan, dont des militants kurdes, accusent Ankara de parfois collaborer avec les djihadistes en Syrie, une allégation fermement rejetée par les autorités turques.

Les internautes ne pouvaient toujours pas vendredi se connecter à Wikipédia depuis la Turquie sans passer par un VPN (réseau privé virtuel).

Le patron de l'Autorité turque des technologies de communication et d'information (BTK), Omer Celik, a indiqué cette semaine que le blocage resterait en vigueur tant que les décisions de justice exigeant le retrait d'articles ne seraient pas respectées.

Signe de la colère des autorités turques, la municipalité d'Istanbul a annulé mardi une invitation à un forum prévu mi-mai sur les villes «intelligentes» envoyée au fondateur de Wikipédia, Jimmy Wales.

Réagissant samedi au blocage du site, M. Wales avait souligné sur Twitter que «l'accès à l'information est un droit humain fondamental. Peuple turc, je serai toujours à vos côtés pour défendre ce droit».

Le blocage de Wikipédia est intervenu moins de deux semaines après la victoire de M. Erdogan à un référendum sur le renforcement de ses pouvoirs qui suscite l'inquiétude de l'opposition. Celle-ci accuse le président turc de dérive autoritaire.

Les autorités turques ont par le passé bloqué temporairement plusieurs réseaux sociaux, comme Twitter, notamment après des attentats.