À une semaine du second tour de la présidentielle en France, la candidate d'extrême droite Marine Le Pen a poursuivi dimanche une campagne tous azimuts contre son rival Emmanuel Macron pour tenter de le battre le 7 mai.

Après un déplacement surprise cette semaine auprès de salariés d'une usine menacée de fermeture au moment même où le centriste rencontrait leurs syndicats, Mme Le Pen a déposé une gerbe devant une stèle en mémoire de déportés à Marseille (sud), sans la presse, peu avant un hommage similaire prévu par M. Macron.

«Je ne fais pas commerce des commémorations. Ce ne sont pas des événements électoraux», a-t-elle affirmé sur la chaîne BFMTV, tandis que sa nièce, la députée Marion Maréchal-Le Pen, a dénoncé «l'opportunisme» de M. Macron.

Ce dernier s'est rendu au Mémorial de la Shoah et au Mémorial des martyrs de la déportation à Paris, avant de faire une déclaration programmée à l'occasion de la journée nationale du souvenir des victimes de la déportation.

Marine Le Pen a aussi improvisé une visite à Gardanne (sud) axée sur la défense de l'environnement, en vantant sa vision d'une «véritable écologie». Cette campagne menée tambour battant, en contraste avec le tempo plus modéré de son adversaire, vise à faire mentir les sondages qui la donnent battus le 7 mai.

Le candidat centriste pro-européen, 39 ans, cherche lui à se placer sur le terrain des «valeurs» qu'il entend incarner face au parti anti-immigration et anti-Europe. Il s'était déjà rendu cette semaine dans un village martyr de la Seconde Guerre mondiale pour «ne jamais oublier» «une page de l'Histoire de France des plus noires».

Les heures sombres de la guerre ont ressurgi au cours de cette campagne avec plusieurs polémiques autour du Front national. Le président par intérim du parti a ainsi été évincé après avoir été accusé de propos négationnistes, ce qu'il dément.

Quant à la candidate, elle a suscité un tollé en affirmant que la France n'était pas «responsable» d'une rafle massive de juifs en 1942 à Paris.

«Perdu la boussole»

L'écart se ressert entre les deux finalistes - Macron est crédité de 59 % des intentions de vote contre 41 % à son adversaire - et l'alliance inédite scellée samedi entre la candidate du Front national et le chef du parti souverainiste «Debout la France» pourrait renforcer sa position.

Nicolas Dupont-Aignan (4,7 % des voix au premier tour) sera nommé premier ministre en cas de victoire, a annoncé Marine Le Pen. Son ralliement a été qualifié par un soutien-clé de M. Macron, le centriste François Bayrou, de «symptôme extrêmement grave» d'un pays ayant «perdu la boussole».

La candidate a récusé dimanche toute «contradiction» sur l'euro après avoir affirmé samedi dans son projet d'accord avec M. Dupont-Aignan que sortir de l'euro, mesure emblématique de son projet ces dernières années, n'était pas «un préalable» à toute politique économique.

Dans un entretien au quotidien Le Parisien, elle a réaffirmé que le pays aurait bien «une monnaie nationale» destinée au quotidien des Français tandis que l'euro resterait en vigueur pour les échanges internationaux. La candidate, qui cherche à rassurer sur une mesure controversée dans l'opinion, maintient le flou sur le délai de cette transition monétaire.

Parallèlement, des appels de tous bords se sont multipliés pour exhorter les électeurs à voter Macron pour «protéger les valeurs de la République».

L'élection de Le Pen serait quelque chose de «monstrueux», a ainsi estimé l'ancien secrétaire de Jean Moulin, figure de la résistance française à l'occupation nazie. «Le Pen, dans la vie politique française, représente la négation de tout ce pour quoi nous nous sommes battus», a jugé Daniel Cordier, 96 ans.

À l'adresse des Français voulant s'abstenir, en particulier les partisans déçus du conservateur François Fillon et du tribun de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, une soixantaine d'associations et d'ONG ont appelé à se mobiliser «face à celles et ceux qui prônent le rejet de l'autre et le repli sur soi».

À rebours de ces appels et mises en garde, le pape s'est refusé à toute consigne de vote, qualifiant samedi Marine Le Pen de représentante de «la droite forte», ajoutant qu'il ne savait pas «d'où vient» M. Macron.