Le président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy a promis mardi à la Catalogne que 4,2 milliards d'euros seraient investis sur son territoire d'ici 2020, une stratégie visant à contrer l'indépendantisme dans la région gouvernée par les séparatistes.

Le conservateur Mariano Rajoy, au pouvoir en Espagne depuis 2011, a annoncé à Barcelone «un effort qui s'élèvera jusqu'à 4,2 milliards d'euros d'investissements en infrastructures, transports et logement, entre cette année et 2020, c'est-à-dire plus d'un milliard par an».

Il s'agit de la première annonce d'envergure faite par le gouvernement espagnol, depuis le lancement de son «opération dialogue».

Cette initiative vise à réduire le fossé grandissant entre Madrid et Barcelone, au moment où les dirigeants séparatistes de la région préparent un référendum - interdit - sur l'indépendance de la région.

Durant son premier mandat (2011 à 2016) M. Rajoy avait été accusé de refuser le dialogue avec les nationalistes et séparatistes catalans.

Reconduit en novembre à la tête du gouvernement, mais privé de majorité parlementaire, il a finalement promis un rapprochement avec la Catalogne, pour tenter de résoudre ce qu'il a qualifié par le passé de «plus grave problème» auquel l'Espagne fait face.

La vice-présidente du gouvernement, Soraya Sáenz de Santamaría, s'est vu confier la responsabilité des relations avec les gouvernements régionaux et semble davantage disposée au dialogue que le précédent interlocuteur des régions autonomes, le ministre du Budget Cristóbal Montoro.

Le référendum n'est pas négociable, a répété mardi M. Rajoy, mais une fois surmontée la crise économique, «une nouvelle dynamique d'investissement dans les infrastructures nécessaires» peut être lancée.

L'exécutif espère ainsi séduire une partie des Catalans récemment convertis à l'indépendantisme qui, selon différentes enquêtes, se contenteraient d'une plus grande autonomie et de meilleurs financements.

Pluie de millions

La région réclamait davantage d'investissements publics bien avant l'essor de l'indépendantisme. Il y avait cru à partir de 2010 à la faveur de la crise économique et de l'annulation partielle par le Tribunal constitutionnel d'un statut accordant une plus large autonomie à la Catalogne.

Au nombre des griefs dont s'est nourri l'indépendantisme figurent l'arrivée tardive du train à grande vitesse à Barcelone en 2008 - 16 ans après celui de Séville -, le manque d'autoroutes gratuites ou d'investissements pour l'aéroport et le port de la deuxième ville d'Espagne ou encore les récurrents retards affectant le réseau de train de banlieue.

Mariano Rajoy a promis des investissements sur tous les fronts: près de 4 milliards d'euros jusqu'en 2025 pour le réseau des trains de banlieue, 200 millions pour les aéroports, 850 pour les routes, 587 pour les ports...

Il s'est aussi engagé à terminer avant 2020 le tronçon catalan du «corridor méditerranéen», des connexions ferroviaires qui doivent relier l'Europe avec tout le littoral oriental de l'Espagne jusqu'à Algésiras, afin de faciliter le transport de marchandises.

Il a également réaffirmé son intention d'approuver un nouveau plan de financement régional, alors que la Catalogne et d'autres régions se plaignent d'apporter beaucoup plus au budget national que ce qu'elles reçoivent.

«Je veux une Catalogne prospère dans une Espagne florissante», a dit M. Rajoy, avant de demander aux nombreux chefs d'entreprise présents «de l'aide pour gagner tous ensemble la bataille de la modération».

Le gouvernement régional présidé par l'indépendantiste Carles Puigdemont (centre-droit) a, lui, par avance dénigré cette soudaine offre de Madrid.

«Les promesses d'investissement (...) ont perdu toute crédibilité aux yeux de la société catalane», a écrit M. Puigdemont dans un article conjoint avec le vice-président de la région, Oriol Junqueras (Gauche républicaine), publié mardi dans le quotidien régional El Periódico.

M. Puigdemont effectuait au même moment une visite aux États-Unis, pour défendre l'idée du référendum sur l'indépendance de la Catalogne, comparant cette cause avec la lutte pour les droits civiques menée au siècle dernier par les noirs américains.

Le gouvernement régional reste décidé à organiser cette consultation, en dépit des condamnations, interdictions et mises en garde prononcées par la justice espagnole.

Le budget de la région, voté la semaine dernière, prévoit ainsi de débloquer des fonds pour l'organisation du référendum.