Les Néerlandais, pour beaucoup encore indécis après une campagne marquée par des questions d'identité et une crise diplomatique avec la Turquie, votaient mercredi pour des législatives considérées comme un baromètre du populisme en Europe.

Après le Brexit au Royaume-Uni et la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine, tous les yeux sont braqués sur la formation du député islamophobe Geert Wilders, qui est redescendu dans les derniers sondages après avoir caracolé en tête pendant de nombreux mois.

Celui-ci a voté vers 8h15 GMT dans une école de la banlieue de La Haye, devant de très nombreux journalistes. «Quel que soit le résultat des élections aujourd'hui, le génie ne rentrera pas dans sa lampe et cette révolution patriotique est là pour rester», a-t-il affirmé.

Dans la file du bureau de vote, Esther Zandt, 52 ans, estime que le député est «un monsieur assez embêtant». «Je ne veux pas vivre dans un monde où la droite populiste l'emporte et j'ai donc voté contre» lui, explique-t-elle.

Pendant la campagne, le premier ministre Mark Rutte a tenté de transformer l'élection en duel avec Geert Wilders et assuré aux Néerlandais qu'ils avaient le choix entre deux options: le chaos ou la stabilité.

Les 12,9 millions d'électeurs potentiels pourront voter jusqu'à 20h00 GMT (16h00 à Montréal) dans des milliers de bureaux de vote installés dans les écoles, les gares, les magasins, ou parfois même chez des particuliers. Aux dernières législatives, la participation était de 74,3%.

Baisse de Wilders

Alors qu'un nombre record d'électeurs ignorent encore vers quel candidat se portera leur crayon rouge une fois dans l'isoloir, les derniers sondages montrent que le Parti populaire libéral et démocrate (VVD) de Mark Rutte distance le Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders.

Le résultat de la formation populiste sera considéré comme un test, avant des élections dans les mois qui viennent en France puis en Allemagne. Pour la candidate française Marine Le Pen, le député aux cheveux peroxydés «est un patriote», a-t-elle affirmé sur RFI et France 24.

Le parti de Mak Rutte VVD est crédité de 24 à 28 sièges sur les 150 que compte la chambre basse du parlement néerlandais, loin pourtant de ses 40 sièges dans le parlement sortant.

Le PVV, qui a fait la course en tête pendant des mois, n'est crédité que de 19 à 22 sièges et est talonné par les partis traditionnels, comme l'Appel Chrétien-démocrate (CDA) et les progressistes de D66.

Le CDA, qui a longtemps dominé la politique néerlandaise, pourrait également devenir la plus grande formation du pays, et est presque assuré de se retrouver au gouvernement. Pendant la campagne, il a proposé d'obliger les écoliers à chanter l'hymne national et a rouvert le débat sur la double nationalité.

Tout comme le VVD, ces deux partis ont promis de ne pas collaborer avec Geert Wilders. Dans son programme politique qui tient en un feuillet, celui-ci a promis de fermer les frontières aux immigrants musulmans, d'interdire la vente du Coran et de fermer les mosquées, dans un pays dont la population compte environ 5% de musulmans.

Paysage fragmenté

Même si le PVV sortait des urnes comme la plus grande formation du pays, ce qui est peu probable aux yeux des experts, Geert Wilders ne devrait pas figurer au gouvernement. Or le système électoral néerlandais, à la proportionnelle presque intégrale, oblige à créer des coalitions de gouvernement.

Compliquant le paysage politique, une crise diplomatique a éclaté pendant le week-end entre La Haye et Ankara, après l'interdiction faite par les autorités néerlandaises à des ministres turcs de participer à des réunions en faveur du président Recep Tayyip Erdogan.

Un nombre record de 28 partis présentent des listes. Dans un paysage aussi fragmenté, la formation de la nouvelle coalition pourrait prendre des mois - le record actuel est de 208 jours - et résulter en un accord à quatre ou cinq partis.

Par peur d'attaques internet, les voix seront cette année intégralement comptées à la main et les résultats officiels seront communiqués la semaine prochaine.

Également dans la file, Roger Overdevest, assure avoir voté «de manière stratégique contre la gauche». Il ne pense pas que Wilders puisse l'emporter : «je pense que les gens ont vu ce qu'il se passe si on a un populiste en tant que président...».