Les sept candidats à la primaire de la gauche française se confrontent jeudi soir lors d'un premier débat télévisé, avec l'espoir d'endosser le rôle du champion pour l'élection présidentielle, qui s'annonce pour l'instant comme un duel serré entre la droite et l'extrême droite.

La gauche française sort fragmentée de cinq ans de mandat de François Hollande, marqué par une impopularité record. La mairesse socialiste de Paris Anne Hidalgo a ainsi dénoncé jeudi, dans un entretien au journal Le Monde, « l'immense gâchis du quinquennat qui se termine ».

Cinq anciens ministres du gouvernement de François Hollande sont en concurrence pour la primaire : l'ex-premier ministre Manuel Valls, étiqueté favori, mais fragilisé par des revirements, Arnaud Montebourg (Économie), Benoît Hamon et Vincent Peillon (Éducation), et Sylvia Pinel (Artisanat, Logement), la seule femme candidate.

Jean-Luc Bennahmias, centriste de gauche, et François de Rugy, écologiste, complètent le bal des prétendants au scrutin organisé les 22 et 29 janvier.

Au-delà de ses adversaires de droite (François Fillon) et du Front national (Marine Le Pen), le vainqueur de la primaire sera confronté à deux rivaux partis en cavalier seul à la présidentielle : le chef de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, et l'ex-ministre de l'Économie Emmanuel Macron, 38 ans, dont les réunions publiques attirent les foules.

« Enjeu de mobilisation »

Trois thématiques seront abordées jeudi soir : les questions économiques et sociales, le terrorisme, et enfin les valeurs de la République, la laïcité et la place de l'islam en France. Deux autres débats sont prévus d'ici le premier tour.

À droite, les bonnes prestations de François Fillon lors des débats avaient été suivies d'un spectaculaire bond dans les sondages, puis de sa victoire à la primaire de novembre.

Le défi pour le Parti socialiste, selon le responsable de l'institut de sondage IFOP Frédéric Dabi, est « un enjeu de mobilisation » et de « crédibilisation » face à des électeurs déçus de la gauche.

L'audience sera un premier indice. En 2011, 4,9 millions de téléspectateurs avaient regardé le premier débat de la primaire de la gauche, puis 2,66 millions d'électeurs s'étaient déplacés au premier tour. 

La droite, elle, a réuni 5,6 millions de téléspectateurs pour son premier débat de primaire et mobilisé 4,3 millions de votants au premier tour. Le PS affiche des objectifs de participation plus modestes, autour de 2 millions d'électeurs le 22 janvier.

Selon un sondage publié dimanche, Manuel Valls, 54 ans, entré dans la course après le renoncement surprise de François Hollande à briguer un second mandat, serait assez largement en tête au premier tour de la primaire, mais sa victoire n'est pas acquise au second tour.

Célèbre pour sa défense de la « démondialisation » et du protectionnisme, l'ex-ministre de l'Économie Arnaud Montebourg, 54 ans, remercié en août 2014 pour avoir critiqué le virage libéral du président Hollande, est son principal adversaire.

Plus à gauche, Benoît Hamon est celui qui bénéficie aujourd'hui de la meilleure dynamique, au point de talonner Arnaud Montebourg dans les dernières enquêtes.

Parmi les sujets qui divisent les candidats, il y a la récente loi sur une réforme du droit du travail, emblématique du gouvernement Valls, dont MM. Hamon et Montebourg réclament l'abrogation pure et simple.

La proposition-choc de Benoît Hamon d'instaurer un revenu universel (environ 700 euros - environ 970 $ CAN) suscite aussi la controverse.

Si son promoteur y voit une réponse à la « raréfaction du travail », Manuel Valls s'est dit « opposé à une société de l'assistanat et du farniente », tout comme Arnaud Montebourg, pour qui cette mesure aurait « pour conséquence d'augmenter de 50 % la totalité des impôts ».

Sur l'Europe, si les candidats partagent le même diagnostic d'une Union en « crise », ils divergent radicalement sur la stratégie de réforme, comme sur le respect ou non des engagements de la France en matière de déficit budgétaire.

Lors du débat, les candidats devront réussir à marquer leurs différences sans se déchirer, pour pouvoir se rassembler derrière le vainqueur de la primaire.

Franchir le cap du premier tour de la présidentielle en avril exigerait cependant d'élargir le rassemblement. « Le problème qui est posé pour l'ensemble des candidats progressistes : c'est qu'il y en a un de trop », a souligné le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, en appelant à une « clarification » après la primaire, dans un appel du pied à M. Macron.

photo JOEL SAGET, AFP

De gauche à droite et de haut en bas: Jean-Luc Bennahmias, Benoît Hamon, Arnaud Montebourg, Vincent Peillon, Sylvia Pinel, François de Rugy et Manuel Valls.