Elle a été la première à réagir. À 7 h du matin, heure française, avant même les résultats officiels, Marine Le Pen a adressé ses félicitations à Donald Trump ainsi qu'au « peuple américain, libre ».

La chef du Front national (FN) a réitéré son enthousiasme en après-midi lors d'une courte allocution au siège du parti d'extrême droite, affirmant que la victoire de Donald Trump était « une bonne nouvelle » et qu'elle serait « bénéfique » pour la France.

« Ce qui s'est passé cette nuit n'est pas la fin du monde, mais la fin d'un monde », a dit Marine Le Pen.

Mme le Pen, réjouie, a rappelé que le FN et le nouveau président américain partageaient sur plus d'un point la « même conception de l'action politique », axée entre autres sur le protectionnisme et le rejet de l'immigration.

Ce discours favorable était toutefois loin d'être partagé. Alors que plusieurs médias s'inquiétaient d'une possible répercussion de cette élection sur la présidentielle française de 2017, brandissant à nouveau le spectre d'une victoire du Front national, la quasi-totalité de la classe politique exprimait plutôt sa préoccupation.

Au premier rang, le président de la République François Hollande a livré un discours glacial, félicitant du bout des lèvres le milliardaire pour sa victoire, qui ouvre selon lui une « période d'incertitude ».

Le chef socialiste a notamment promis « vigilance et franchise » dans les discussions à venir avec Trump, rappelant que « certaines positions » prises par ce dernier pendant la campagne devaient être « confrontées aux valeurs et intérêts [que la France partage] avec les États-Unis. » Une vision partagée par son ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, qui a, lui, ouvertement parlé des « inquiétudes » provoquées par les engagements de Trump.

Guère plus d'empressement à droite, où le favori des primaires, Alain Juppé, a évoqué noir sur blanc le « risque que la démagogie et l'extrémisme font courir à la démocratie ». Juppé, homme de consensus, a toutefois gardé la porte ouverte, invitant Trump à « définir sa politique internationale et les axes de son dialogue avec la France et l'Europe ».

Un «avertissement» pour la France

Également candidat aux primaires de la droite, l'ancien président Nicolas Sarkozy, que certains ont déjà comparé à Trump en raison de son discours anti-immigration et « climatosceptique », a d'abord salué le « leadership » de l'homme, avant de le mettre au défi « d'apporter aux attentes immenses qui se sont exprimées, des réponses crédibles qui soient fidèles aux idéaux de la grande démocratie ».

La plupart ont, du reste, souligné la leçon d'humilité que représente cette improbable victoire, reconnaissant qu'elle était le résultat d'un mécontentement et d'un rejet du système par la majorité. Selon l'ancien premier ministre Dominique de Villepin, il faut en ce sens voir l'élection de Donald Trump comme un « avertissement », référence à peine voilée à la montée de l'extrême droite française qui, rappelons-le, récolte actuellement 27 % des intentions de vote en France.

Dans les médias, la stupeur était aussi au rendez-vous, alors qu'on tentait de spéculer sur les conséquences de ce séisme politique, Donald Trump apparaissant comme un météorite aux cheveux de feu se rapprochant dangereusement de la Terre. Bien peu l'avaient vu venir et l'on se perdait hier en conjectures pour évaluer l'ampleur des dégâts à venir, dans le monde, en Europe et, bien sûr, en France.

Seul journal à annoncer le résultat dans sa version papier en raison de son heure tardive de sortie, Le Monde tranchait enfin, en suivant lui aussi Marine Le Pen du regard. « Dans le monde qui s'ouvre avec cette élection, tout est possible, même ce que l'on a encore du mal à regarder en face : la prise du pouvoir par un parti extrémiste. »