Reconnue coupable d'avoir assassiné son bébé en l'abandonnant à la marée montante sur une plage du nord de la France, une femme a été condamnée vendredi à 20 ans de réclusion criminelle par la justice française.

« L'accusée est condamnée à 20 ans de prison pour assassinat », a déclaré la présidente de la cour d'assises de Saint-Omer (nord), Claire Le Bonnois, affirmant que la cour avait retenu l'altération du discernement.

Dix-huit ans de prison ferme avaient été requis à l'encontre de Fabienne Kabou par l'avocat général Luc Frémiot, qui avait fustigé « une planification froide » de son crime par l'accusée. Elle encourait la réclusion criminelle à perpétuité.

La Cour d'assises a également ordonné « un suivi psychojudiciaire avec injonction de soins » de Fabienne Kabou, a ajouté sa présidente Claire Le Bonnois.

Selon ses aveux, Fabienne Kabou s'était rendue le 19 novembre 2013, depuis la région parisienne où elle vivait, à Berck, cité balnéaire du nord de la France, dans le but de noyer Adélaïde. Durant sa courte vie, la fillette n'aura pas eu d'existence légale, faute d'avoir été inscrite à l'état civil.

La mère avait abandonné sa fille assoupie sur la plage à la marée montante. Le corps de la fillette avait été retrouvé au petit matin, le lendemain, par des pêcheurs de crevettes.

Trois psychiatres ont conclu que Fabienne Kabou présentait une « pathologie psychiatrique de type paranoïa délirante », mais d'autres ont contesté cette thèse, parlant simplement d'« un trouble psychique ».

« Pourquoi Adélaïde est-elle morte ? Parce que sa mère est folle », a assuré l'avocate de la défense dans sa dernière plaidoirie, Me Fabienne Roy-Nansion, donnant sa conclusion à une semaine de procès hantée par une question : « Pourquoi Fabienne Kabou a-t-elle tué sa fille ?».

Les « meilleurs experts de France » ont conclu à une « altération du discernement », mais « on voudrait soutenir que cette femme est un monstre froid qui a tout organisé, une machine de guerre, une machine à tuer », a souligné Mme Roy-Nansion.

« À un cheveu près, cette femme dépendait définitivement de la médecine et non de la justice », a-t-elle encore insisté, avant de s'adresser aux jurés : « Vous devez tenir compte de cette pathologie mentale, cette femme n'a pas sciemment tué un enfant ».

Pour l'avocat général, qui estime qu'il faut arrêter avec « ce tout psychiatrique », au contraire, Mme Kabou est pleinement responsable de ses actes. « La vie ce n'est pas ça, on est dans l'humain, dans les sentiments », a-t-il dit.

« Le sujet, c'est cette petite dont on a si peu parlé, parce que Madame Kabou a pris toute la place en raison de sa personnalité », a-t-il dit en s'adressant à l'accusée.

Mais « ce n'est pas parce que vous êtes belle et que vous avez un QI de 135 qu'on ne peut pas vous poser des questions qui font mal », a-t-il ajouté.

« Le masque de l'indifférence »

« Vous aviez le masque de l'indifférence et de l'ironie et je ne peux pas le supporter », a-t-il poursuivi, en regardant l'accusée, impassible dans son box, tête haute et bras croisés.

Pour M. Frémiot, « pire que de la préméditation, c'est de la planification froide ».

Dès le premier jour, Fabienne Kabou, d'origine sénégalaise, avait dit à la Cour n'avoir « pas d'autre explication que la sorcellerie » à son geste criminel.

« J'étais pressée par quelque chose, j'étais poussée, j'étais incitée... Je n'avais pas le choix, je n'avais le choix de rien, la date était fixée, c'était ce jour-là et pas un autre », avait affirmé l'accusée au début de son procès.

Mais pour certains psychiatres, les explications mystiques de Fabienne Kabou étaient une façon pour l'accusée de ne pas admettre sa maladie.

« Ca arrange tout le monde que ce soient des malades qui fassent ça », mais l'assassinat d'Adelaïde est « un infanticide comme un autre », avait plaidé jeudi Me Jean-Christophe Boyer, avocat de l'association L'enfant Bleu.

Personnalité déroutante et contradictoire, Fabienne Kabou avait glacé la salle d'audience mardi en parlant de son forfait. « Quand je rentre à Paris, j'ai l'attitude de quelqu'un qui est allé faire une course... », avait-elle déclaré.

L'accusée n'a pas voulu prendre la parole vendredi avant que le jury ne se retire pour délibérer.