Les autorités turques ont affirmé mardi avoir identifié l'auteure de l'attentat suicide qui a fait 35 morts dimanche au coeur d'Ankara, présentée comme une rebelle du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) liée aux combattants kurdes de Syrie.

«Il a été établi qu'il s'agit de Seher Cagla Demir, née en 1992 (...) entraînée en Syrie par l'organisation terroriste YPG», les Unités de protection du peuple, bras armé du principal parti kurde de Syrie, a annoncé le ministère de l'Intérieur.

Selon le ministère, cette femme de 24 ans née à Kars (nord-est) a été identifiée grâce à ses empreintes digitales. Selon la presse, l'étudiante a rejoint les rangs du PKK en 2013 puis est passée en Syrie pour y être «entraînée au terrorisme».

Les autorités d'Ankara pensent qu'elle a été aidée par un deuxième «kamikaze», un homme dont l'identité n'a pas été révélée.

L'attentat de dimanche n'a pas été revendiqué. Mais dès lundi, le premier ministre Ahmet Davutoglu s'est déclaré «quasi-certain» qu'il était l'oeuvre du PKK.

Son mode opératoire est presque identique à celui d'un autre attentat-suicide qui a visé le 17 février, déjà à Ankara, des bus militaires et fait 29 morts. Un groupe radical proche du PKK, les Faucons de la liberté du Kurdistan (TAK), en avait assumé la responsabilité.

M. Davutoglu et le président turc Recep Tayyip Erdogan avaient pour leur part attribué cette précédente attaque aux YPG et au PKK. Ces deux mouvements avaient démenti.

Avant la trêve entrée en vigueur fin février en Syrie, la Turquie a pilonné à plusieurs reprises les positions des YPG en Syrie, qu'elle considère comme un groupe «terroriste» car lié au PKK. Ces tirs d'artillerie ont provoqué des tensions avec son allié américain, qui soutient les YPG dans le cadre de la lutte contre le groupe Etat islamique (EI).

La police a poursuivi mardi ses opérations dans les milieux kurdes. Douze personnes ont été arrêtés en lien direct avec l'attentat et 200 de plus soupçonnées de soutenir les «terroristes», selon l'agence de presse progouvernementale Anatolie.

«Soulèvement»

Pendant ce temps, les affrontements qui opposent depuis trois mois les forces de sécurité aux rebelles dans le coeur historique de Diyarbakir, la «capitale» du sud-est à majorité kurde, ont gagné mardi un autre district de la ville, placé sous couvre-feu.

Au moins un policier et trois combattants du PKK ont été tués, a-t-on appris auprès des services de sécurité locaux. Une dizaine de civils ont également été blessés, provoquant un début d'exode dans les quartiers visés, a constaté un journaliste de l'AFP.

L'armée et la police ont engagé ces derniers mois des opérations d'envergure dans plusieurs villes où le PKK a déclenché un «soulèvement» contre Ankara. Les combats y ont fait de nombreux morts, y compris des civils, et provoqué des déplacements massifs de la population locale.

Depuis ce week-end, elles sont étendues leur intervention dans trois autres villes également placées sous couvre-feu, Nusaybin, Yüksekova et Sirnak.

Le conflit kurde a repris l'été dernier et a fait voler en éclats les pourparlers de paix engagés par le gouvernement avec le PKK fin 2012.

Dans un entretien accordé avant l'attentat d'Ankara au Times, le principal chef du PKK Cemil Bayik a confirmé le durcissement de son action. «Maintenant, il y aura des combats partout», a-t-il assuré au quotidien britannique.

«Les Turcs ont pillé et brûlé tout ce qu'ils pouvaient dans les villes kurdes où des couvre-feux ont été imposés. Alors maintenant, notre peuple a soif de vengeance», a poursuivi M. Bayik, «notre objectif principal est la chute d'Erdogan».

L'homme fort du pays a répété sa détermination à «éradiquer» le PKK.

Lundi soir, il a plaidé pour un élargissement, à tous ses soutiens, du crime de «terrorisme». «Il n'y a pas de différence entre un terroriste qui tient une arme et quelqu'un qui utilise sa position et un stylo», a-t-il dit dans une menace à peine voilée à la presse d'opposition et au principal parti prokurde du pays.