La grande journée européenne de mobilisation contre les migrants à l'initiative du mouvement islamophobe allemand Pegida n'a pas remporté samedi le succès escompté bien que les partis populistes aient le vent en poupe, aucun défilé n'ayant dépassé les quelques milliers de manifestants.

À Dresde (est de l'Allemagne), berceau de Pegida et centre névralgique de cette journée, 15 000 participants étaient attendus par la police, qui avait mobilisé pour l'occasion près de deux mille fonctionnaires et plusieurs canons à eau.

Déjouant ces prévisions, entre 6000 à 8000 personnes seulement ont participé à cette manifestation sur les bords de l'Elbe, le fleuve qui traverse la capitale de la Saxe, selon les calculs d'une université locale spécialisée dans l'évaluation des foules.

Pegida, «Patriotes européens contre l'islamisation de l'Occident», mouvement d'extrême droite né en Allemagne à l'automne 2014, avait appelé le 23 janvier à manifester dans 14 pays d'Europe ce samedi sous le mot d'ordre «Forteresse Europe».

Ironie du sort, son fondateur, Lutz Bachmann, n'est pas apparu de la journée, alité pour cause de maladie.

La presse allemande se réjouissait de cette faible mobilisation à Dresde, mais aussi ailleurs en Europe où des rassemblements similaires ont eu lieu.

Les organisateurs «avaient prévu une journée d'action internationale, il n'y a finalement eu que de petites marches», persiflait samedi soir le site d'information Spiegel Online.

«La grande journée d'action de Pegida a plutôt fait un flop», titrait quant à lui le quotidien conservateur Frankfurt Allgemeine Zeitung, se moquant de problèmes techniques qui ont empêché la diffusion vidéo des autres manifestations européennes.

Incidents

Quelque 5000 personnes ont participé samedi dans le coeur historique de Prague à un rassemblement contre l'islam et l'Union européenne organisé par deux groupes d'extrême droite, tandis que seules quelques centaines de personnes ont fait le déplacement à Varsovie, Graz (sud de l'Autriche) ou encore à Birmingham, la deuxième ville du Royaume-Uni.

En parallèle aussi, quelques milliers de personnes ont manifesté en faveur des réfugiés pour contrer Pegida et leurs alliés.

L'objectif de ce mouvement était pourtant une démonstration de force, à un moment où, portés par l'afflux de centaines de milliers de migrants et la crise dans l'Union européenne, les populistes voient leur popularité grandir partout sur le Vieux Continent.

Certaines manifestations ont par ailleurs été émaillées d'incidents. À Calais, où 3700 migrants vivent dans la «Jungle», le plus grand bidonville de France, une vingtaine de personnes hostiles aux réfugiés ont été interpellées.

À Amsterdam, les forces de sécurité antiémeute ont arrêté une douzaine de manifestants, partisans ou adversaires de Pegida, à l'issue d'échauffourées avec des policiers. À Dublin, quelques troubles ont été signalés. Quatre interpellations ont également eu lieu à Prague.

Merkel au centre des critiques

Vent debout contre «l'immigration de masse et l'islamisation», les manifestants rassemblés à Dresde s'en sont principalement pris à la chancelière allemande Angela Merkel, au centre des critiques pour sa politique de main tendue aux migrants.

Dans les autres villes où des rassemblements contre les migrants étaient organisés, les participants ont scandé des slogans tels que «Interdire l'Islam!», «Fermer la frontière !», «Ne permettez pas à Bruxelles de détruire notre société!», «Migrants dehors!» ou encore «Halte à la merkelisation du pays !».

En Allemagne, premier pays concerné avec 1,1 million de demandeurs d'asile en 2015, ce n'est cependant plus Pegida qui a le vent en poupe, mais le parti Alternative pour l'Allemagne (AfD) qui ne cesse de grimper dans les sondages avant des élections régionales clés mi-mars..

Profitant de la crise des migrants, cette formation, qui n'avait pas appelé à manifester, a introduit un discours de droite dure dans le paysage politique, chose longtemps impensable en Allemagne.