Après les eurosceptiques, les europhiles britanniques se sont mis à leur tour en ordre de bataille lundi, pour défendre le maintien du Royaume-Uni dans l'Union Européenne,  avec l'appui de trois anciens premiers ministres.

«Leave.EU», plateforme à laquelle s'est rallié le parti anti-immigration UKIP, et «Vote Leave», qui comprend des membres du Parti conservateur et du Parti travailliste, avaient pris les devants cet automne pour revendiquer leur désir de «Brexit» (British exit).

Ils ont désormais un adversaire officiel, baptisé «Britain Stronger in Europe», qui a lancé sa campagne lundi à Londres en vue du référendum sur l'appartenance du Royaume-Uni au bloc européen prévu d'ici fin 2017 au plus tard.

La dernière pièce du puzzle en place, le débat s'est d'emblée porté sur le terrain du patriotisme. «Rester dans l'Union est un acte patriotique», a lancé Stuart Rose, ancien patron des magasins Marks&Spencer, promu leader de la campagne pro-UE.

«Je ne permettrai à personne de me dire que je suis moins britannique parce que je crois dans une Grande-Bretagne la plus forte possible pour l'économie, pour notre sécurité et pour notre société», a ajouté d'un ton ferme celui qui siège désormais à la Chambre des Lords en tant que pair conservateur.

«Donner le contrôle de nos frontières à des bureaucrates étrangers n'a rien de patriotique. Ça s'appelle une capitulation», a aussitôt répondu Nigel Farage, le tonitruant leader de l'Ukip, qui s'affirme jour après jour comme le principal porte-voix du camp eurosceptique.

Pour essayer de contrer les partisans de la sortie de l'UE, devenus très visibles, «Britain Stronger in Europe» a recruté quelques têtes d'affiche, dont trois anciens premiers ministres, le conservateur John Major et les anciens frères ennemis travaillistes Tony Blair et Gordon Brown.

Aucun des trois n'était cependant présent au lancement de la campagne à la Truman Brewery, qui était l'une des plus grandes brasseries au monde au 19e siècle. C'est donc Stuart Rose qui a été chargé de dire au pays que la Grande-Bretagne se portait «mieux dans l'UE» et que le risque de partir était «trop grand».

«Le saut dans l'inconnu»

«Allons nous choisir d'être plus forts dans une économie qui offre des opportunités pour l'avenir et une prise sur les événements ? Ou allons nous choisir l'affaiblissement, le saut dans l'inconnu et la perte de notre influence qui mettra en péril notre économie et notre sécurité?», a-t-il plaidé.

«Nous sommes plus forts, plus riches et plus en sécurité dans l'Europe que nous ne le serions tout seuls», a ajouté l'ancien homme d'affaires, qualifiant le référendum de «vote le plus important d'une génération».

Promis par le premier ministre conservateur David Cameron sous la pression du parti europhobe Ukip et de l'aile eurosceptique de son propre parti, le référendum doit avoir lieu d'ici fin 2017 au plus tard, même si beaucoup de politiques estiment que le rendez-vous pourrait être avancé à 2016.

David Cameron, qui est entré dans une phase de renégociation avec ses partenaires européens, continue à dire qu'il militera pour le maintien du Royaume-Uni dans une UE réformée mais qu'il n'exclut «rien» s'il n'obtient pas les concessions voulues.

Le premier ministre doit déjeuner jeudi à Bruxelles avec le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker pour un bilan d'étape.

Interrogé sur le lancement de la campagne pro-UE, son porte-parole a déclaré lundi que l'important était d'avoir «un débat sérieux et argumenté».

Les sondages, aux résultats très contrastés, ont cependant montré ces dernières semaines un resserrement des intentions de vote, alors que le maintien dans l'UE était en tête depuis quelques années. Début septembre une étude de l'institut Survation indiquait même que les Britanniques étaient majoritairement favorables à un «Brexit».

Le camp eurosceptique s'est montré très actif sur les plateaux de télévision tout au long du week-end  pour exposer son cas et assurer que les deux plateformes, «Leave.EU» et «Vote Leave», étaient «complémentaires».

Nigel Farage a aussi suggéré que Boris Johnson, le populaire maire de Londres, pourrait rejoindre les partisans du «out». «Tout le monde le connaît. Ce serait une excellente nouvelle», a dit le patron de l'Ukip avec gourmandise.