Le maire de Rome Ignazio Marino, l'un des hommes politiques les plus impopulaires d'Italie, a démissionné jeudi soir, après avoir accepté de rembourser 20 000 euros (près de 30 000 $) de notes de restaurant payées avec la carte de crédit de la ville.

«J'ai fait mon choix : je présente ma démission», déclare M. Marino dans un message aux Romains, évoquant la perte du soutien de son Parti démocrate (PD) qui le poussait vers la sortie et ajoutant que «les conditions politiques» pour poursuivre étaient «très minces, voire inexistantes».

Dans un communiqué mis en ligne sur sa page Facebook plus tôt dans la journée, le maire centre gauche de la ville éternelle a assuré que les notes de frais concernaient des dîners ou déjeuners professionnels, mais qu'il préférait rembourser pour mettre un terme à la polémique.

Une partie de la presse italienne a en effet entrepris de décortiquer toutes ses additions, à la recherche de celle qui prouvera qu'il a dîné en tête-à-tête avec sa femme et non avec un ambassadeur ou un homme d'affaires.

Ce «dinergate» n'est que le énième épisode d'un long feuilleton raconté à l'envi dans une partie des médias italiens, sur les gaffes, ratages et supposées malversations de cet ancien chirurgien, réputé jusqu'à présent plutôt honnête.

Face à cette situation qui était devenue intenable, son adjoint Marco Causi, également responsable des finances de la municipalité, ainsi que les responsables pour le transport et le tourisme à la mairie de Rome avaient démissionné quelques heures plus tôt.

La maire de gauche a mis un minuscule bémol à sa démission, rappelant qu'aux termes de la loi il dispose de 20 jours pour changer d'avis.

M. Marino a précisé qu'il utiliserait ce délai pour voir s'il était possible de «reconstruire les conditions politiques» pour rester en place, mais l'entreprise semble extrêmement difficile, tous les principaux dirigeants du PD, y compris le chef du gouvernement Matteo Renzi, lui ayant tourné le dos.

Si la démission devient effective dans 20 jours, le préfet de Rome devra nommer un commissaire qui va gérer la ville jusqu'aux prochaines élections, vraisemblablement au printemps prochain.

Fiat Panda

Élu en 2013 pour cinq ans, le maire a d'abord été accusé d'avoir utilisé sans permis d'accès valide sa Fiat Panda personnelle dans le centre historique. Il est aussi critiqué pour avoir banni les voitures de la grande avenue longeant les forums antiques et limité les terrasses des restaurants sur les places ou trottoirs.

Cet ancien professeur de chirurgie à l'Université de Pittsburgh aux États-Unis est pourtant sorti indemne du scandale de «Mafia capitale», le plus gros ayant jamais atteint Rome, qui a révélé un vaste réseau de corruption impliquant des élus de tous bords, dont l'ancien maire de droite.

Le pape lui-même a participé fin septembre à cette offensive, en démentant avoir jamais invité M. Marino lors de sa visite à Philadelphie.

Certains commentateurs se demandent parfois ce qui justifie pareille campagne de dénigrement à l'encontre de ce spécialiste reconnu des greffes d'organe, écologiste de gauche circulant à vélo, aimant la voile et la plongée sous-marine.

Certaines y voient une forme de vengeance de la part de tous ceux qui tiraient profit du vaste réseau de «Mafia capitale».

Mais d'autres y voient plus simplement la rançon de son incompétence et son inaction supposées face aux désordres d'une ville, dont les habitants ne supportent plus les retards dans les transports en commun et la saleté dans les rues.

Fin août, M. Renzi avait déjà étroitement encadré M. Marino en plaçant à ses côtés le préfet de Rome, Franco Gabrielli, en vue de l'année sainte, le Jubilé voulu par le pape François, qui devrait attirer des millions de pèlerins dans la capitale italienne à partir de décembre.

M. Marino est devenu si impopulaire que le présentateur de Radio Capital à Rome a proposé ironiquement jeudi d'énumérer tout ce que l'on pourrait reprocher au maire de la capitale. «À Milan, le bus 43 n'arrive jamais, c'est la faute de Marino!», s'est ainsi amusé un auditeur.