Le deuxième gouvernement d'Alexis Tsipras a enregistré mercredi soir un premier impair avec la démission d'un secrétaire d'État mis en cause pour propos antisémites et homophobes, moins de 24 heures après son entrée en fonction avec pour objectif le redressement économique de la Grèce.

Dimitris Kammenos, issu du parti de droite souverainiste Anel avec lequel M. Tspiras a reformé une coalition gouvernementale après sa victoire électorale dimanche a annoncé dans la nuit de mercredi à jeudi sa démission du poste de secrétaire d'État aux Infrastructures.

Cet ex-lobbyiste, âgé de 49 ans, a indiqué dans un communiqué vouloir ainsi permettre «le bon fonctionnement du nouveau gouvernement» au nom de «l'intérêt du pays».

M. Tsipras venait de demander implicitement sa démission auprès de son homonyme et dirigeant de l'Anel, Panos Kammenos, soulignant que sa présence était incompatible avec les «valeurs» du gouvernement si les propos lui étant imputés étaient authentiques.

Dimitris Kammenos avait notamment opéré en juin sur Facebook une comparaison entre le plan de redressement proposé par les créanciers européens et le camp d'extermination d'Auschwitz.

Un ancien député de gauche, Petros Tatsopoulos, a aussi retweeté mercredi un message de 2013, dans lequel il relayait la thèse d'un complot derrière les attaques du 11 septembre 2001.

Selon l'hebdomadaire To Vima, il avait également qualifié en juin la Gay Pride grecque de «pathétique».

La controverse sur sa nomination avait enflé toute la journée, contraignant M. Tsipras à intervenir alors qu'il participait à Bruxelles au sommet d'urgence sur les migrants, pressé par ses partenaires de mieux endiguer les flux transitant par la Grèce.

Il a plaidé à son arrivée pour un «partage du fardeau» et des «responsabilités» au sein de l'UE, alors que plus de 300.000 arrivants, en majorité des Syriens, ont débarqué dans son pays cette année, pour la plupart en provenance des côtes turques.

Négociations sur la dette 

Comptant encore quatre membres de l'Anel, dont Panos Kammenos, reconduit à la Défense, le nouveau gouvernement de M. Tsipras, seul premier ministre de gauche radicale de l'UE, diffère pour les postes clés peu du précédent, intronisé en janvier.

Entretemps, M. Tsipras a démissionné le 20 août, pour retrouver une majorité parlementaire, perdue par la défection de son aile gauche lors du vote du troisième plan d'aide au pays en cinq ans, d'un montant de 86 milliards d'euros sur trois ans.

M. Tsipras, qui en a signé le principe le 13 juillet, pour éviter à la Grèce d'être éjectée de l'euro, s'affirme désormais prêt à l'appliquer à la lettre, tout en revendiquant des marges pour en amortir le coût social.

M. Tsipras espère ainsi voir s'ouvrir vers novembre des négociations en vue de réduire la dette du pays, qui atteint 170% du PIB.

«La priorité est d'en finir avec les obligations de l'accord, dont plus de 60% ont déjà été accomplies», a résumé devant la presse mercredi le nouveau ministre adjoint des Finances, Georges Chouliarakis, appelant à ce que «la question de la dette soit abordée à l'issue du premier examen» de l'avancée du programme par les créanciers.

En plus de Chouliarakis, estimé à Bruxelles, M. Tsipras a maintenu au poste de ministre des Finances le mesuré Euclide Tsakalotos.

Le commissaire européen aux Affaires économiques, le Français Pierre Moscovici, s'en est félicité: «Heureux de continuer ensemble pour aider la Grèce», a-t-il tweeté.

La priorité du nouveau gouvernement est de remettre sur pied les finances et l'économie du pays, mises à mal par six ans de crise, puis sept mois de procrastination avec les créanciers sous le premier mandat de M. Tsipras.

«Notre objectif est la reprise et la reconstruction», a déclaré le vice-premier ministre Yannis Dragasakis à la presse mercredi, soulignant la volonté du gouvernement de «laisser une empreinte de gauche» su sa gestion.

L'ancien communiste Nikos Kotzias retourne lui aux Affaires étrangères, tandis que le poste-clé de l'immigration reste dans les mains de Ioannis Mouzalas, efficace ministre par intérim pendant un mois.

Grand créancier du pays avec l'UE, le Fonds monétaire international (FMI) s'est dit pour sa part mercredi «pressé de travailler» avec le gouvernement Tsipras «sur les politiques à appliquer pour remettre le pays sur le chemin d'une croissance durable».