Libéré de l'influence modératrice des libéraux-démocrates, le premier ministre britannique David Cameron peut relancer des projets mis de côté ces cinq dernières années. Guerre contre les syndicats, réduction du soutien aux énergies vertes et des aides sociales, etc., les réformes conservatrices d'envergure se multiplient.

David Cameron a pris le pays par les cornes. Extrêmement actif depuis sa réélection le 7 mai dernier, le dirigeant conservateur britannique a lancé une vague de réformes.

Dégagé de l'influence modératrice des libéraux-démocrates, il a décidé de s'attaquer à de nombreux dossiers bloqués au cours de son premier quinquennat.

L'ancien vice-premier ministre et leader libéral-démocrate Nick Clegg avait clairement expliqué la situation il y a deux ans. «Notre place dans ce gouvernement est d'empêcher le pendule de rebasculer de la gauche vers la droite, a-t-il dit. Nous ne sommes pas là pour intégrer un des partis, mais pour les ancrer au centre. Parfois, un compromis n'est pas possible et il faut dire non.»

L'effondrement de sa formation laisse aujourd'hui la main libre à ses anciens partenaires. Les électeurs conservateurs, déçus de la ligne de centre droit suivie par leur gouvernement depuis cinq ans, ont retrouvé le sourire. Le reste du pays redécouvre, parfois avec stupeur, la nature du parti conservateur.

La loi sur les syndicats

Symboliquement, le gouvernement s'est attelé d'emblée à la loi sur les syndicats, qui a été présentée au Parlement la semaine dernière. «Cette loi est une priorité», a prévenu le nouveau ministre aux Entreprises Sajid Javid.

Le geste est fort, car personne n'a limité la liberté d'action des syndicats depuis l'ancienne première ministre Margaret Thatcher dans les années 80. Si la loi passe, ne seront autorisés que les mouvements de grève dont le vote aura recueilli une participation de plus de 50% des syndiqués et, dans certains services publics-clés (la santé, l'éducation, les transports et les pompiers), le soutien de 40% des inscrits. Actuellement, aucun niveau de participation n'est requis et seule la majorité des votants est nécessaire.

Par ailleurs, les grévistes devront prévenir leur employeur 14 jours à l'avance et ils pourront être remplacés par des employés temporaires, alors qu'une telle interdiction est en place depuis 1973. Surtout, David Cameron veut également compliquer le financement des opérations politiques (manifestations, campagnes publiques) des syndicats. Ces derniers risquent de perdre leur visibilité et leur capacité à manifester.

Exemption d'impôt

Le deuxième angle des réformes relancées par David Cameron a été révélé par le chancelier de l'échiquier George Osborne. Les exemptions d'impôt sur la succession ont été très élargies puisque les résidences principales de moins de 1 million de livres (2 millions de dollars canadiens) ne sont plus imposées.

Autres mesures jusqu'alors bloquées par les libéraux-démocrates: les moins de 25 ans ne seront plus autorisés à recevoir de l'aide au logement, les autoroutes seront partiellement privatisées, des critères de résidence géographiques seront mis en place pour le calcul de l'attribution des aides sociales, et sans doute du salaire des fonctionnaires, et les subventions aux énergies renouvelables seront coupées. Elles devraient l'être encore plus à l'automne, lorsque le responsable des finances exposera les coupes des budgets ministériels. Il a prévenu mardi dernier que certaines administrations devaient s'attendre à une baisse de leur budget de 40%.

Enfin, le gouvernement veut alléger les restrictions liées au licenciement, afin de faciliter les mises à pied de masse, et mettre fin à la loi sur les droits de l'homme. Passée en 1998, elle vise à harmoniser le droit britannique avec la Convention européenne des droits de l'homme.

De nombreuses voix se sont déjà élevées dans le pays contre son éradication. Mais David Cameron, engagé tête baissée dans ses réformes, ne les écoutera pas tant que sa majorité lui permettra d'agir.