La Hongrie a annoncé mardi la suspension unilatérale d'un règlement européen clé concernant les demandes d'asile, invoquant la «protection des intérêts hongrois».

«La barque est pleine», a plaidé le porte-parole du gouvernement Zoltan Kovacs dans des entretiens au journal autrichien Die Presse et au site hongrois Index, en rappelant que la Hongrie connaissait un afflux exceptionnel de migrants depuis le début de l'année.

«Dublin III», le règlement suspendu «pour une durée indéterminée» et «pour des raisons techniques» selon un communiqué diffusé par le gouvernement après l'annonce de M. Kovacs, organise l'examen des demandes d'asile en Europe. Il dispose qu'une demande d'asile doit être examinée dans le premier pays européen dans laquelle la personne est arrivée.

Cette règle est à l'origine d'une polémique franco-italienne ces derniers jours, lorsque Paris a réclamé que 200 migrants arrivés à la frontière franco-italienne de Vintimille (nord-ouest) après avoir été enregistrés en Italie soient «réadmis» dans ce pays.

Le gouvernement du conservateur Viktor Orban plaide que «le système de gestion de réfugiés de la Hongrie est surchargé», conduisant ce pays d'Europe centrale à «jouer un rôle qui est au-dessus de ses forces».

Selon les chiffres officiels, la police hongroise a interpellé plus de 60 000 migrants illégaux entre le 1er janvier et lundi 22 juin. Presque toutes ces personnes, arrivant pour la plupart de Syrie, d'Irak et d'Afghanistan, mais aussi du Kosovo, ont été arrêtées à la frontière hungaro-serbe.

Le 17 juin, la Hongrie a annoncé la construction prochaine d'une clôture de 4 mètres de haut sur les 175 km de ce tracé, suscitant la réprobation de Belgrade et de Bruxelles.

Une grande majorité des réfugiés arrêtés en Hongrie ont l'intention de rejoindre l'Allemagne ou d'autres pays d'Europe du Nord plutôt que de demeurer dans le pays. À peine recensés, ils tentent de poursuivre leur route via l'Autriche.

La Hongrie, suite à sa décision de mardi, n'acceptera plus qu'ils soient renvoyés sur son territoire.

L'Autriche, principal pays touché, a aussitôt critiqué l'annonce de Budapest. La plupart des réfugiés clandestins interpellés dans la petite république alpine arrivent en effet soit de Hongrie, soit d'Italie via la ligne de train reliant Milan à l'Allemagne.

«Qui veut continuer d'avoir une Europe sans frontières doit respecter les règles de Schengen», a commenté la ministre de l'Intérieur Johanna Mikl-Leitner à l'agence APA: «Cela implique bien sûr également de s'en tenir au règlement de Dublin».

L'UE exige une «clarification immédiate»

 L'UE a demandé mardi à la Hongrie de clarifier de toute urgence sa décision de suspendre un règlement européen clef statuant qu'une demande d'asile doit être examinée dans le premier pays européen dans lequel la personne est arrivée.

Alors que Budapest a invoqué une «raison technique», «la Commission a demandé à la Hongrie une clarification immédiate sur la nature et l'étendue de ce problème technique», a expliqué une porte-parole de la Commission européenne.