Trois des premiers clients de l'400M ont suspendu dimanche les vols de cet avion de transport militaire européen après un accident mortel à Séville, dans le sud de l'Espagne où les autorités ont salué le courage de passants qui ont dégagé deux survivants.

Les survivants, le mécanicien de vol et un ingénieur, grièvement blessés, étaient dans un état stable dimanche, dans deux hôpitaux de Séville, selon des sources hospitalières. Les quatre autres occupants de l'appareil, qui devait être livré à la Turquie en juillet, sont morts. Tous travaillaient pour Airbus Defense and Space, a annoncé le constructeur.

Le mastodonte s'est écrasé dans un champ au nord de l'aéroport samedi vers 13H00 lors d'un vol d'essai après avoir heurté une ligne à haute tension, en tentant apparemment un atterrissage de fortune.

Selon la  présidente du gouvernement régional d'Andalousie, dont Séville est la capitale, Susana Diaz, deux agriculteurs et un passant se sont précipités avant même l'arrivée des services de secours pour aider le mécanicien de vol et un ingénieur à sortir de la carcasse fumante de l'appareil.

Héroïsme

Le chef du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, a qualifié de «héros» l'un de ces volontaires, en publiant sur son compte twitter une photo où il serre la main de cet agriculteur identifié seulement comme «Manuel». Susana Diaz, citée dans le journal Diario de Sevilla, a salué «le geste exemplaire de ces citoyens».

L'Allemagne, la Grande-Bretagne puis la Turquie ont annoncé la suspension des vols de l'A400M, en attendant que soient identifiées les causes de la catastrophe. La France, premier client de l'A400 qui en possède déjà six, n'a pas immobilisé ses avions.

«Nous n'avons pas d'éléments pour nous contraindre à arrêter notre flotte A400», a déclaré le colonel Jean-Pascal Breton, chef du service de presse et de communication de l'armée de l'air.

La Malaisie, qui a pris livraison de son premier appareil en mars, n'a pas encore annoncé sa position. Douze A400M son actuellement en service.

L'accident devait être évoqué lors d'une rencontre des ministres français, allemand, polonais, italien et espagnol de la Défense, réunis dimanche à Lorient en Bretagne.

Outre le constructeur Airbus, qui a envoyé ses spécialistes sur place, la Guardia Civil espagnole a ouvert une enquête tandis que le gouvernement formait une commission conjointe des ministères de la Défense et du Budget. Les enquêteurs pourront s'appuyer sur les enregistrements de boites noires de l'A400M.

Nouveau coup dur

L'accident est un nouveau coup dur pour cet avion qui devait être un fleuron de la coopération militaire européenne, mais qui accumule les déboires depuis le lancement du programme en 2003.

L'A400M devait à la fois satisfaire les besoins des armées de l'air de ses sept clients de lancement -Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Belgique, Luxembourg et Turquie- et de leurs industriels.

Ainsi, plutôt que d'acheter un moteur sur le marché, les gouvernements ont insisté pour faire fabriquer le moteur par un consortium européen, EPI, formé du français Snecma (Safran), du britannique Rolls Royce, de l'espagnol ITP et de l'allemand MTU, ce qui selon Airbus, a contribué aux retards de quatre ans.

Déjà en 2010, Airbus avait failli jeter l'éponge. Tom Enders, le patron d'Airbus avait menacé d'abandonner le programme, si les pays de lancement n'acceptaient pas de partager les surcoûts: 6,2 milliards d'euros, soit 30% du budget initial.

Depuis les premières livraisons, l'A400M a été critiqué par ses clients, plus récemment par l'Allemagne.

Airbus qui avait déjà présenté ses excuses à la Grande-Bretagne pour les retards, a annoncé fin janvier la réorganisation de sa branche aviation militaire avec le départ de son directeur, Domingo Ureña-Rasoir, remplacé par un autre Espagnol, Fernando Alonso.

Au total, 174 appareils ont été commandés à ce jour, dont 50 pour la France, 53 pour l'Allemagne, 27 pour l'Espagne et 22 pour le Royaume-Uni.