Les dirigeants européens ont honoré dimanche les victimes des atrocités nazies et averti que «le pire peut encore se produire» en Europe, lors de trois cérémonies commémorant la libération des camps de Bergen-Belsen en Allemagne, Jasenovac en Croatie et du Struthof en France.

Le «pire peut encore se produire et c'est en le connaissant que nous pouvons le prévenir», a averti le président français François Hollande en visitant le camp du Struthof en Alsace aux côtés de dirigeants européens. «L'antisémitisme et le racisme sont encore là, et «nous devons agir (...) pour protéger ceux qui peuvent en être encore aujourd'hui les victimes», a souligné M. Hollande, alors que la France a été le théâtre de plusieurs attaques jihadistes visant notamment des Juifs.

Les présidents du Parlement européen Martin Schulz et du Conseil européen Donald Tusk, la première ministre de Lettonie, Laimdota Straujuma, qui assure la présidence tournante de l'UE, et le secrétaire général du Conseil de l'Europe, Thorbjarn Jagland, étaient aux côtés de François Hollande pour une commémoration dans le seul camp de concentration nazi en territoire français à l'occasion de la journée française de la déportation.

M. Hollande a, par ailleurs, appelé l'Europe à la solidarité face à l'afflux de migrants en Méditerranée en soulignant qu'elle n'avait «pas le droit de détourner les yeux» de «drames effroyables». Mais l'Europe «doit faire respecter ses frontières», a-t-il ajouté.

Le Struthof fut le lieu de détention de quelque 52 000 déportés, dont près de 22 000 y périrent. Une chambre à gaz y avait été construite pour y expérimenter des gaz de combat sur les détenus. Il fut libéré par les Alliés le 23 novembre 1944.

À Bergen-Belsen (Basse Saxe, ouest de l'Allemagne), où sont morts plus de 50 000 déportés et 20 000 prisonniers de guerre de 1941 à 1945, le président allemand Joachim Gauck a rendu hommage à la Grande-Bretagne pour la libération du camp le 15 avril 1945.

Les soldats britanniques ont aidé à restaurer «l'humanité» en Allemagne, a souligné le président allemand en présence notamment de 70 survivants du camp.

Dans la période de l'après-guerre, les Alliés ont été les «ambassadeurs de la culture démocratique qui ne recherchait pas la vengeance contre l'ennemi», a déclaré M. Gauck. «Ils étaient ainsi le contre-exemple éclatant de ces Allemands qui au cours des années précédentes avaient conquis, soumis, réduit en esclavage et pillé l'Europe».

Parmi ceux qui ont perdu la vie à Bergen-Belsen figurait l'adolescente juive Anne Frank, qui y est morte du typhus, et dont le journal est devenu l'un des récits emblématique du sort réservé aux Juifs pendant l'Occupation.

Le président du Congrès juif mondial, Ronald S. Lauder, a invité à plus de vigilance contre une résurgence des attaques antisémites en Europe et la progression des partis d'extrême droite dans certains pays, comme en Hongrie et en Grèce.

«Auschwitz croate»

À Jasenovac, surnommé «l'Auschwitz croate», plusieurs centaines de personnes, dont des dirigeants croates et plusieurs survivants, ont assisté à une cérémonie, 70 ans après le démantèlement du camp ouvert par le régime fasciste des Oustachis installé en Croatie à la faveur de l'invasion de la Yougoslavie par l'armée hitlérienne en 1941.

«Les horreurs de Jasenovac sont une mise en garde et nous rappellent que nous ne devons plus jamais permettre la discrimination et les persécutions sur la base des différences nationales, confessionnelles, idéologiques ou sexuelles», a déclaré le président du Parlement croate, Josip Leko.

Le premier ministre croate Zoran Milanovic a affirmé que la Croatie moderne, membre de l'Union européenne depuis 2013, a pris ses distances, dans sa Constitution, du régime oustachi.

«Pour moi, il n'y avait qu'une seule armée croate pendant la Seconde Guerre mondiale, celle des partisans croates» ayant combattu le régime nazi, a-t-il déclaré.

Les historiens ne parviennent pas à se mettre d'accord sur le nombre des victimes, serbes et juives essentiellement, mais aussi des antifascistes croates, qui périrent dans ce camp, l'un des 80 ouverts par le régime croate d'alors. Les estimations varient d'environ 82 000, selon le musée de Jasenovac, à 700 000, selon les sources serbes. Le musée du Mémorial de l'Holocauste à Washington évalue, pour sa part, à 100 000 le nombre des victimes.