Les trafiquants responsables du naufrage de dimanche en Méditerranée ont battu à mort plusieurs migrants avant que le chalutier ne parte de Libye avec plus de 750 personnes à bord, selon les témoignages des survivants cités par le parquet de Catane (Sicile).

Pour les besoins de l'enquête, «la marine militaire effectuera au plus vite une reconnaissance de l'épave» afin d'obtenir des images et «d'évaluer la nécessité et la faisabilité d'éventuelles opérations», a ajouté le parquet, sans préciser s'il s'agissait d'extraire les corps des victimes ou de ramener l'épave à la surface.

«On peut raisonnablement dire qu'il y avait plus de 750 personnes à bord», a précisé dans un communiqué le parquet, qui a pratiquement fini d'auditionner les 28 survivants, dont deux hommes soupçonnés d'être le capitaine du bateau et son second. En s'appuyant sur les témoignages, l'ONU avait évoqué 800 morts dans cette catastrophe, la pire depuis des décennies en Méditerranée.

Les survivants ont décrit un «climat de violence» avant même le départ de Libye.

Dans l'usine près de Tripoli où ils ont été enfermés avec 1000 à 1200 personnes, des «bastonnades auraient provoqué plusieurs décès, et d'autres migrants seraient morts d'épuisement», a rapporté le parquet.

Des hommes en uniforme et en armes semblaient diriger les lieux, et l'un des survivants a raconté avoir dû remettre son argent à des policiers.

Au moment d'embarquer, ils ont été conduits dans des fourgons vers la côte, puis en canot pneumatique vers le chalutier.

Sur le canot, «un garçon aurait été tué parce qu'il s'était levé sans permission, et son cadavre aurait ensuite été jeté à la mer», selon le parquet.

Sur le prix du voyage, les sommes annoncées par les survivants vont de 730 à 7000 $. Ceux qui avaient payé le moins étaient enfermés dans la cale, ce qui a poussé le parquet à ajouter le chef de séquestration à l'encontre du capitaine, outre ceux de naufrage volontaire, homicides et incitation à l'immigration clandestine.

Selon les témoignages, le Tunisien Ali Malek pilotait le bateau et a laissé à plusieurs reprises son second, le Syrien Mahmoud Bikhit, contacter par téléphone satellitaire leur organisation en Libye.

À l'arrivée du cargo portugais dérouté par les gardes-côtes, le chalutier a chaviré parce qu'il «était chargé jusqu'à l'invraisemblable» et en raison des «mauvaises manoeuvres du commandant», a affirmé le parquet, précisant que le chalutier avait heurté trois fois le cargo avant de sombrer.

Le parquet a également fourni une liste des survivants: douze Maliens, quatre Érythréens, trois Bangladeshis, deux Sénégalais, deux Somaliens, un Sierra-Léonais, un Ivoirien et un Gambien.